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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/160

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MÉPHISTOPHÉLA

seule, en proie à son exécrable amie, voilà ce qui était impossible. Donc, il ne partirait pas tout de suite, il rentrerait chez lui, dirait à sa mère : « Allons, les malles, plus vite que çà », et il emmènerait la vieille et la jeune, avec lui, à Alger, où était son régiment. Et, là-bas, il surveillerait la petite. Si elle avait déjà fait quelque chose de mal, eh bien ! elle s’en tiendrait là, bien surveillée, bien défendue ; à dix-sept ans, redevenir une honnête fille, rien de plus simple. Le vice, chez les très jeunes, c’est une plaie qui se ferme vite à cause du bon sang ; et, après, on n’en voit même pas la cicatrice. Un jour ou l’autre, Emmeline épouserait un militaire, un solide gaillard : ça lui paraîtrait autrement bon que les guenipes qui baisent ou qui mordent avec des bouches sans moustaches. Mais il n’y avait pas une minute à perdre. Il fallait l’emporter, cette gamine, avec la maman. D’avance, il était bien décidé à ne tenir compte ni des étonnements, ni des pleurnicheries. Et il s’en retourna vers chez lui.

Pourtant, non, il ne rentrerait pas tout de suite. Cinq heures du matin à peine. Les femmes du faubourg, qui s’éveillent dès l’aube, seraient surprises de ce marié n’ayant pas passé la nuit dans la chambre nuptiale. Il fallait, pour éviter les commérages, attendre le plein jour ; même,