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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/253

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MÉPHISTOPHÉLA

états de la femme : la prostitution et l’aristocratie, la Fille et la Grande Dame. Non pas voisines et lointaines pourtant, comme aux premières représentations, comme aux tribunes de courses, mais mêlées, se coudoyant, ne faisant qu’une foule. Et elles se traitèrent en égales. Ce ne fut pas, d’une part, orgueil, défi, ni, de l’autre, dédaigneuse courtoisie. Non, se voyant de près, se mesurant, se constatant, elles reconnurent qu’elles étaient deux forces également considérables ; que leurs disparates de rang et d’éducation n’excluaient pas leur équivalence ; comme deux plateaux de métaux divers peuvent avoir le même poids. Ennemies, sans doute, mais ennemies entre qui la victoire resterait douteuse. Cette nuit ressemblait à ces trêves entre guerroyeurs policés, où l’on voit les officiers de la ville assiégée souper dans la tranchée ou sous la tente avec les officiers assiégeants, non sans des félicitations de la belle conduite en les récentes batailles. Après avoir offert un verre de champagne à la petite Léa Nicot, — qui le vida fort joliment, le nez dans la coupe, et garda un peu de mousse aux narines, — « oh ! que c’est amusant, comment faites-vous cela ? » — la marquise de Belvélize ne manqua point de la complimenter à propos de la façon