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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/258

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MÉPHISTOPHÉLA

— Vous songeriez à prétendre que ces jeunes femmes, de qui nous sommes les maris, les frères, les amis, ou les amants, que ces hommes auxquels nous sommes heureux ou fiers de serrer la main, ont fait, véritablement, des crimes, ont sur la conscience des scélératesses de mélodrame ?

— Et vous, vous oseriez affirmer qu’il n’y a ici ni assassins, ni empoisonneuses, ni banqueroutiers, ni faussaires, ni séducteurs de vierges, ni traîtres à la patrie ? D’ailleurs, je ne vous ai pas parlé des remords que produisent les forfaits brutaux, les actions atroces ou infâmes, punies par la loi. Il est un autre remords ! celui des fautes qui n’impliquent ni le châtiment légal ni même le mépris social ; et ces fautes existent, hélas ! ou plutôt cette faute existe ; car, innombrables et diverses par les circonstances, elles n’en sont pas moins une seule par leur essence ; et, s’il vous plaît qu’elle ait un nom, vous pouvez l’appeler : le Péché. Non pas dans le sens qu’avait ce mot au temps où les âmes simples aimaient, bénissaient le repentir qui leur mériterait la délicieuse absolution ; mais dans le sens qu’il lui faut donner à l’heure où nous sommes, à l’heure où les vivants sans foi n’attendent plus rien du ciel sans paradis. Le péché, c’était la transgression de la