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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/290

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MÉPHISTOPHÉLA

on est. Eh ! oui, elle avait le cœur gros ; rien de plus triste que de ne pas être aimée d’une personne qu’on aime tant ; mais il était naturel que Sophor eût de la tendresse pour l’autre, plus jolie, et honnête. « C’est déjà bien gentil à elle, de rester avec moi, de ne pas me mépriser. » Telle était cette petite créature, très humble en dépit de ses airs hardis, très simple malgré ses malices, corrompue et ingénue, une enfant dépravée de qui l’âme est restée douce. Mais un droit qu’elle avait, c’était celui de souffrir de la douleur de Sophor ; et, celle-ci, souvent, après des heures où elle n’avait pas embrassé Magalo, ne lui avait même pas dit une parole, la trouvait assise dans quelque fauteuil du salon, la tête entre les mains et sanglotante, pauvre petite si tourmentée. « Tu pleures ? qu’as-tu ? parle, je t’ai fait de la peine ? — Non, non, rien, ce n’est rien. J’ai mes nerfs. C’est passé. » Et Magalo riait avec des yeux humides.

Une fois, sortie pour aller retenir une loge aux Variétés, Magalo ne rentra pas à l’heure du dîner, ne rentra pas le soir, et Sophie fut prise d’une rage. Elle se souvenait ! Magalo avait parlé, un jour, de reprendre son ancienne vie, à cause de l’argent, d’aller au Peters, au Helder, où elle avait des amis. Elle était peut-être re-