Aller au contenu

Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/357

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
347
MÉPHISTOPHÉLA

rendant visite tous les matins, l’allant voir, les soirs, au foyer de la Comédie ; elle l’entourait, l’investissait de regards, d’invisibles caresses lointaines qui semblaient proches pourtant ; et ce qui rayonnait d’elle mettait autour de Céphise une chaleur où celle-ci éprouvait une gêne singulière, où elle étouffait parfois jusqu’à perdre haleine ; elle se sentait cernée, pénétrée d’un vouloir toujours plus resserré autour d’elle ; Sophor présente, elle faisait inconsciemment le geste d’écarter des liens. Or la convoitise de Mme d’Hermelinge s’exaspérait de l’attente, se faisait plus impérieuse, plus irrésistible ; et, une fois que Céphise Ador, après le spectacle, énervée d’un drame où elle avait pleuré de vraies larmes, et d’une querelle, tout à l’heure, avec son amant, et de l’orage prochain qui par la fenêtre entr’ouverte mettait dans la loge des pesanteurs de feu, commençait à dégrafer, d’une main fébrile et moite, son corsage, elle se sentit étreinte par deux bras convulsifs, et, se tournant, elle eut dans la bouche tout le baiser vainqueur de Sophor ! Désormais elle n’appartint plus à soi-même, ni à son amant. À peine possédée, elle fut asservie. Car Sophor était la violente et la savante, la donneuse effrénée d’incomparables joies, celle qui veut tout, qui peut tout, — le cher bourreau à qui tou-