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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/360

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MÉPHISTOPHÉLA

près du lit d’Emmeline, et bien d’autres fois encore. Vraiment, c’était un rire, comme si, en elle, on se moquait d’elle. Depuis quelques années, il était moins discret, moins lointain, semblait résolu à être tout à fait perceptible. Pourtant, on eût dit qu’il ne voulait pas être effrayant. Non, il complimentait. « Ah ! ah ! vraiment ? oui, oui, très bien ! » Seulement, quand il persistait, c’était agaçant à la fin. Oh ! Sophor ne s’en inquiétait pas outre mesure. Un tintouin, voilà tout, qui ressemblait à un ricanement. Un phénomène nerveux. À coup sûr, si elle avait consulté un médecin, elle aurait été délivrée à jamais de ce petit bruit importun, qui devait avoir un nom dans les livres de science. Mais elle l’entendait si peu souvent, et c’était si peu de chose ! En somme, un mal trop léger pour valoir un traitement. Et chaque jour elle roulait plus furieusement sur la pente de son vice, ayant, quoiqu’elle descendît, l’impression de monter. Il ne lui suffisait plus, maintenant, d’éprouver ses joies, elle voulait les étaler, en défier l’hypocrisie ou l’honnêteté sociale ; elle traversait la vie parisienne, traînant après soi de belles filles enamourées, comme l’impudent Pierre d’Arezzo, dans Venise, se promenait suivi des quarante