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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/449

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MÉPHISTOPHÉLA

qu’elle veut. La vie d’autrefois, où j’étais comme une hirondelle dans une serre d’aigle, comme un fétu dans du feu, recommencerait peut-être ; je ne pense pas que j’aurais le courage de me dérober à des alarmes, à des transes, qui étaient si affreuses, et qui étaient si charmantes. Elle me tuerait, soit, je mourrais. Mais il n’y a pas de danger qu’elle revienne ! et tout est pour le mieux. Je ne l’espère pas, parce que je ne la regrette pas. Je suis redevenue tout à fait ce que j’étais avant de la connaître. J’ai mes amies qui sont très aimables, qui ne me bousculent pas, qui viennent causer avec moi, pendant que je travaille, comme on causait autrefois dans la cour de la pension. Elles sont très drôles, elles racontent des histoires, on rit, c’est amusant. Elles m’apportent des fleurs, je leur donne des aquarelles, ou des pastels, qu’elles trouvent jolis, qui sont jolis en effet. Quelquefois, avec Rosélia, ou avec Luce Lucy, — vous voyez, je ne vous cache rien — nous restons encore à parler dans l’atelier, longuement, après qu’il ne fait plus grand jour. Ce n’est pas terrible. Rien que de penser à Sophor, j’ai un frisson. Êtes-vous tranquille, maintenant ? Vous voilà sûre que votre amie ne vient pas ici, que j’ai peur d’elle. Allons, souriez. Ne soyez plus en colère. Si vous voulez,