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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/499

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MÉPHISTOPHÉLA

sont exclus des troubles, des recherches, des inquiétudes, leur félicité est comme un château de cartes qui se tient debout, parce qu’il n’y a pas de vent. D’ailleurs, cette ressource leur demeure que s’ils voulaient être autrement, ils le pourraient ; c’est l’un des avantages de la vertu que, lorsqu’elle s’ennuie, elle songe qu’il lui serait possible de pécher, — pécher, pour les braves gens, c’est comme une réserve, où l’on ne touche pas, — tandis que le mal, malgré même le divin repentir, ne saurait devenir l’innocence ; et, tous les retours étant insipides, il ne sait plus que faire quand il s’est heurté au mur qui le borne. Sophor ne pouvait s’empêcher d’avoir cette idée que ç’aurait été très bon d’être semblable aux simples… Le calme de ce dîner sous la tonnelle, faisait qu’en descendant la route elle se prenait à pleins poings les cheveux ! sa colère contre ces imbéciles s’exaspérait d’envie. Ah ! ça, voyons, était-elle folle ? Cela ne lui suffisait donc pas qu’Emmeline, si longtemps désirée, lui fût apparue indigne du désir ; que, du sein d’Emmeline, eut coulé devant elle du lait maternel ? elle voulait un autre désespoir ? elle avait besoin, après la torture de la déception, d’une humiliation plus cruelle encore que cette torture ? elle n’était pas éloignée de penser qu’elle avait tort,