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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/530

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MÉPHISTOPHÉLA

rouée, écartelée, elle l’aurait voulu, à la condition de ne plus sentir l’affreux remugle lui sortir de tous les pores et lui rentrer dans le corps par la bouche et les narines.

Tant de douleurs, enfin, la fatiguaient, l’éreintaient, l’usaient ; et le dernier ressort dont elle se soutînt, faillit. Oui, l’orgueil s’exténua en elle ; cet orgueil auquel depuis si longtemps elle avait cessé de devoir la joie, auquel elle avait dû au moins de la pouvoir feindre. Si elle essayait encore, en un reste de diabolique jactance, de ne pas avouer aux autres sa défaite, elle n’avait plus la force de la nier à soi-même. Elle était vaincue, elle n’en pouvait plus, elle demandait grâce, elle cessait de railler les bonnes gens simples qui vivent en famille, qui, n’espérant pas d’étranges plaisirs, n’ont pas d’étranges peines. Elle avait eu tort d’être extraordinaire, différente des autres femmes. Définitivement lâche, elle avait perdu jusqu’à la vigueur de se révolter, de se dire que, enfin, elle ne s’était pas faite telle qu’elle était, que la responsabilité de ses fautes remontait à quelque mystérieuse puissance. Elle ne discutait pas. Elle admettait qu’elle était coupable. Le châtiment l’avait convaincue du crime. Seulement, elle aurait bien voulu ne plus souffrir, parce qu’elle avait trop souffert, et qu’elle