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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/97

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MÉPHISTOPHÉLA

ploi, Luberti convenait mieux qu’aucun autre, obligé à la discrétion par le péril d’une brouille avec des complices. D’ailleurs, être la femme, véritablement, de ce coquin, c’était à quoi elle n’avait pas songé une minute. « Nous nous marions, je te donne soixante mille francs, et tu pars pour Hombourg où tu te fais sauter la cervelle si tu ne fais pas sauter la banque. — Non, dit-il, je ne joue pas à la roulette. À la roulette on ne peut pas tricher. » Mais il accepta le mariage et les soixante mille francs. Tous comptes réglés, Phédo se trouva seule, et ravie de l’être. D’abord un orgueil lui conseilla de s’installer à Paris, de donner des fêtes, d’humilier les anciennes camarades de théâtre, beaucoup plus vieilles et beaucoup moins riches qu’elle. Mais de longues années de cupidité avaient développé en elle une effroyable avarice ; avec la même ardeur qu’elle avait volé l’argent des autres, elle voulait garder le sien. Certes, elle ne craignait pas de se laisser aller à des faiblesses pour quelque cabotin bellâtre, qui l’eût battue et ruinée ; le cœur, les sens, si elle en avait jamais eu, c’était bien mort en elle. De ce côté, pas de danger. Mais, recevoir du monde, donner des bals, des dîners, cela coûte gros ; et ceux qui se sont amusés chez vous, sont les premiers à se moquer de vous. Puis, pour triom-