Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/593

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Il faut être tyran pour n’être pas victime.
Mais, quand l’état l’exige un crime n’est plus crime ;
S’il lui devient utile, il est justice alors ;
D’ailleurs, qui se défend peut frapper sans remords.
Du peuple, il faut oser forcer l’obéissance :
Où la crainte a cessé, la menace commence ;
Et le sujet d’hier peut être roi demain.
Du coursier qui s’emporte il faut serrer le frein,
Aiguillonner les flancs pour dompter sa colère,
Il faut…


Scène III.

BOABDIL, IBRAHIM, chef des juges.
BOABDIL.

                Quoi ! dans ces lieux venez-vous seul, mon père ?
Les juges convoqués ne vous suivent-ils pas ?

IBRAHIM.

Ils viennent ; d’un moment j’ai devancé leurs pas,
Remplissant un devoir que l’équité m’impose ;
Qu’à ton courroux ou non ma franchise m’expose,
Je viens pour te donner un conseil paternel ;
Le veux-tu recevoir ?

BOABDIL.

                                      Un conseil, et lequel ?

IBRAHIM.

Jusques à ce moment j’ignore quels coupables,
Pour subir aujourd’hui ses décrets redoutables,
Doivent être remis au pouvoir de la loi.
Mais tandis que leur sort dépend encor de toi,
Avant que dans ces lieux sur eux ma voix prononce,
Quels que soient les forfaits que ce jour nous dénonce,
Je dois te rappeler que trop d’injustes coups…