Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/595

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Mais, bravant leur courroux, l’interprète des lois
Doit oser, s’il le faut, interroger les rois.
Un juge ne doit pas, trompant leur confiance,
Au prix de leur faveur vendre sa conscience !

BOABDIL, s’emportant.

Et vous ne craignez pas qu’excitant ma fureur…

IBRAHIM, avec calme et dignité.

Mon fils, on règne mal en régnant par la peur.
Tout mortel revêtu d’un droit dont il abuse,
Se disant : Je le peux, croit ainsi qu’il s’excuse ;
Mais quand la mort le jette aux pieds de l’Éternel,
Le poids d’une injustice est un fardeau cruel ;
Au tribunal sacré du juge redoutable,
Un roi n’est plus qu’un homme, innocent ou coupable.
Il comparaît alors sans trône et sans flatteurs :
Il n’est pas devant Dieu de témoins imposteurs !

BOABDIL, éperdu.

Oh ! oui, quand Dieu punit, sa justice est terrible !
Contre elle tout refuge est, hélas ! impossible !
Ô mon père !

IBRAHIM

                        Mon fils !

BOABDIL, voyant entrer les juges.
(À part.)

                                          Rien ! rien ! Il n’est plus temps !