Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/142

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peux miracles[1]. Alors nous chantons certaines hymnes qui ont été composées en langue vulgaire par les premiers écrivans de la nation ; elles sont dans toutes les bouches, & peignent la sagesse & la clémence de la Divinité. Nous ne concevons pas comment un peuple entier invoquoit jadis Dieu dans une langue qu’il n’entendoit point ; ce peuple étoit bien absurde, on brûloit du zèle le plus dévorant.

Parmi nous : souvent un jeune homme cédant à son transport, exprime à toute l’assemblée les sentimens dont son cœur est plein[2] ; il communique son enthousiasme aux cœurs les plus froids ; l’amour enflâme & frappe ses expressions. L’Éternel semble alors descendu au milieu de nous, écouter ses enfans qui s’entretiennent de

  1. Si demain le doigt de l’Éternel gravoit ces mots sur la nue, en caracteres de feu : Mortels, adorez un Dieu ! Qui doute que tout homme ne tombât à genoux & n’adorât ? Eh, quoi, mortel insensé & stupide ! as-tu besoin que Dieu te parle francois, chinois, arabe ! Que sont les étoiles innombrables semées dans l’espace, sinon des caracteres sacrés, intelligibles à tous les yeux, & qui annoncent visiblement un Dieu qui se révele ?
  2. Quand un jeune homme a l’enthousiasme de la vertu, fût-il dangereux ou faux, il faut craindre de le détromper ; laissez-le dire, il se rectifiera sans vous : en voulant le corriger, d’un mot vous tueriez peut-être son ame.