Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/194

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ber cet édifice fragile où l’essaim des peines tourmentoit son ame immortelle ; il a béni ce glaive, effroi du méchant ; & lorsqu’on se rappelle la mémoire de ce juste expirant, c’est pour apprendre à mourir comme lui.

Il est mort, cet homme juste, & il a vu couler nos larmes, non sur lui, mais sur nous-mêmes ! Ses frères entouroient son lit funèbre. Nous l’entretenions de ces vérités consolantes dont son ame étoit remplie : nous lui montrions un Dieu dont il sentoit la présence mieux que nous. Un coin du rideau sembloit se soulever devant son œil mourant..... il a levé une tête radieuse, il nous a tendu une main paisible, il nous a souri avant d’expirer.

Vil coupable ! toi qui fus un scélérat heureux, ta mort ne sera pas si douce, redoutable tyran ! Maintenant pâle, moribond, c’est pour toi que le trépas présentera un spectre effrayant ! sois abreuvé de ce calice amer, bois en toutes les horreurs. Tu ne peux lever les yeux vers le ciel, ni les arrêter sur la terre ; tu sens que tous deux t’abandonnent & te repoussent : expire dans la terreur, pour ne plus vivre que dans l’oprobre.

Mais ce moment terrible, dont l’idée seule fait pâlir le méchant, n’aura rien d’affreux pour l’homme innocent. Mon cœur avoue la loi irrévocable de la destruction. Je contemple ces tombeaux comme autant de creusets