Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/318

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la salle du trône. Il est caché dans la foule comme un simple spectateur. Tous les ordres de l’État sont assemblés ce jour-là, & tous ont reçu le mot. Tout-à-coup le monarque se lève, appelle par trois fois le jeune homme. Les flots de la foule s’ouvrent. Étonné, il s’avance d’un pas timide vers le trône, il y monte en tremblant : le roi l’embrasse, & déclare aux yeux de tous les citoyens qu’il est son fils. Le ciel, dit-il d’une voix touchante & majestueuse, le ciel vous a destiné à porter le fardeau de la royauté ; on a travaillé vingt ans à vous en rendre digne, ne trompez pas l’espoir de ce grand peuple qui vous voit. Mon fils ! J’attends de vous le même zèle que j’ai eu pour l’État. Quel moment ! quelle foule d’idées entrent dans son ame ! Le monarque alors lui montre la tombe où repose le monarque prédécesseur, cette tombe où est gravé en gros caractères : l’Éternité. Il continue d’une voix non moins imposante : Mon fils, on a tout fait pour ce moment. Vous êtes sur la cendre de votre aïeul, vous devez le faire renaître ; faites le serment d’être juste comme lui. Je vais bientôt descendre pour occuper sa place, songez que je vous accuserois du fond de cette tombe, si vous abusiez de votre pouvoir. Ah ! mon cher fils, l’Être suprême & le royaume ont les yeux ouverts sur vous ; aucune de vos pensées ne leur échappera. Si quelque mouvement d’ambition ou d’orgueil régnoit en ce moment au fond