Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/358

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tie de l’Amérique forme un royaume séparé, quoique réuni sous un même esprit de législation ? — Nous serions bien extravagans de vouloir porter nos chers compatriotes à deux mille lieues de nous. Pourquoi nous séparer ainsi de nos frères ? Notre climat vaut bien celui de l’Amérique. Toutes les productions nécessaires y sont communes, & de nature excellente. Les colonies étoient à la France ce qu’une maison de campagne étoit à un particulier : la maison des champs ruinoit tôt ou tard celle de la ville.

Nous connoissons un commerce ; mais ce n’est pas l’échange des choses superflues. Nous avons sagement banni trois poisons physiques dont vous faisiez un perpétuel usage : le tabac, le caffé, & le thé. Vous mettiez une vilaine poudre dans votre nez, laquelle vous ôtoit la mémoire, à vous autres François, qui n’en aviez presque point. Vous brûliez votre estomac avec des liqueurs qui le détruisoient, en hâtant son action. Vos maladies de nerfs, si communes, étoient dues à ce lavage efféminé qui emportoit le suc nourricier de la vie animale. Nous ne pratiquons plus que le commerce intérieur, & nous nous en trouvons bien : fondé principalement sur l’agriculture, il est le distributeur des alimens les plus nécessaires ; il satisfait les besoins de l’homme, & non son orgueil.

Personne ne rougit de faire valoir son