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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/258

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avoit occasionné la rareté de l’or, en sorte que les orfèvres se permettoient, au mépris des ordonnances, de fondre les louis. On les fondoit sous mes yeux, par tas, dans les montagnes de Neufchâtel, pour en faire des boîtes de montre.

La refonte ordonnée, l’ancien louis d’or gagnoit un trente-deuxième. Aussi-tôt tous les louis encoffrés, & qui dormoient depuis cinquante ans sans avoir vu le jour, reparurent à la clarté du soleil. On les porta en foule par l’appas du bénéfice ; plusieurs furent tardifs & paresseux, enfoncés & scellés qu’ils étoient par une main avare ; mais ils suivirent enfin leurs frères ; presque tous se montrèrent, & l’espèce d’or monnoyé surpassa de beaucoup les calculs des administrateurs.

On thésaurise donc, & l’inquiète prévoyance, qui rejette toute spéculation, aime mieux garder l’or que de le livrer à la circulation. On vit une infinité de louis qui avoient soixante ans, & qui étoient encore neufs & brillans de jeunesse. Le paysan, dès qu’il a quelques louis, les ense-