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Page:Mercure de France - 1891 - Tome 2.djvu/91

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MERCVRE DE FRANCE ficile et déjà il leur fallait écarter de la main les arbris¬eaux et les surgeons. Puis le travers-bois devint impraticable et ils joignirent un chemin connu sinueux ruban qui dévalait, assombri, sous une voûte de branchailles et où les pas s’étouffaient dans la terré molle. D’ailleurs. ils arrivaient à trente, mètres le raidillon aboutissait au Trou, petite éclaircie au milieu de fourrés inextricables.Là encore le père approcha seul à pas de loup, s’effa¬ çant et le pistolet tout prêt, distinguant déjà des lapins qui s’ébattaient le long des broussailles dans l’exigue clairière. Il épaula, prit son temps, fit feu. Et comme il se retournait pour appeler son fils, Firmin aussi se re¬tournait, sentant quelqu’un derrière lui. Cré bon diou .de bon diousse ! joura le vieux, j’sons- pincés.Le Chaouin criait au gars : il tu bouges je tire ! Rentrant par Campoint, il avait perçu dans le fourré un frôlement, et il guignait les Birette depuis qu’ils avaient rallié la sente. Il amena le fils, qui trem¬blait un peu, auprès du père immobile et mâchonnant.une enfilade de cré bon diou de bon diousse . Il s’empara du lapin que Firmin troublé lui avoua cacher.sous sa blouse, alla ramasser les deux autres qui gisaient,tués du même coup, dans la clairière,, et confisqua le pistolet, que son propriétaire fut ontraint de chercher parmi les épines où il l’avait jeté. Puis, séance tenante,il griffonna un brouillon de procès-verbal, dans la forme invariable qu’il avait adoptée : Nous, garde champêtre de Fernolles, canton dudit, revêtu de tous nos insignes,dont notre plaque etc. »Après quoi, les Birétte ayant.une maison et du bien foncier dapslepays, il poursuivit.son chemin sans plus s’occuper d’eux.Ils en revinrent par la grande ! route. Le fils, pour la première fois en présence de la justice, était impressionné. Le père, soucieux, contractait sa figure en une grimace comique, secouait par instants la tête et sacrait,vouant à tous les diables 1’ sale Chaouin . Mais il se rappela sa pièce de cent sous, et, déridé une minute, il frappa sur sa poche d’un air de défi : N’en voila toujour eune qu’is auront point,les voleurs ! III Devant le palais de justice, Firmin eut une épreinte de peur. Le vieux était simplement contrarié de la promc-