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§ 3. — Langue de la chanson renouvelée.

Ce qui suit est moins une étude sur la langue dans laquelle est écrite la chanson renouvelée qu’une suite de recherches ayant pour objet de déterminer par les caractères linguistiques la patrie du renouveleur. Une étude sur la langue de ce poème est un sujet qu’on ne saurait traiter accessoirement, et qui d’ailleurs ne peut être entrepris que concurremment à une édition critique qui nous manque encore. Je choisis les faits qui me paraissent utiles au but que je me propose, comme je choisis aussi les preuves que je donne de ces faits, ne pouvant entreprendre ici de donner, pour chaque particularité, un dépouillement complet du poème. Je me sers exclusivement des exemples fournis par les rimes.

Ce qui frappe tout d’abord lorsqu’on examine, même superficiellement, la langue de Girart, c’est la divergence des formes. Et comme cette divergence s’accuse non-seulement dans le corps des vers, où les copistes pourraient en être responsables, mais aussi à la rime, on est bien obligé de reconnaître qu’on se trouve en présence d’un idiome assez mélangé, quelle que puisse être d’ailleurs la cause qui a réuni sous la plume du même poète, des formes qui n’ont pas coutume de se trouver ensemble. Habitués que nous sommes par tradition à voir le roman de France divisé en deux idiomes : langue d’oui ou français, et langue d’oc ou provençal — division qui ne répond aucunement à la réalité — nous sommes portés à regarder la langue de Girart comme un mélange plus ou moins arbitraire de provençal et de français. Cette vue n’est ni tout à fait fausse ni tout à fait correcte. Pour savoir à quoi nous en tenir, voyons d’abord en quoi consistent les contradictions