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girart de roussillon

con fait d’un oiseau. Mais il n’aura pas vu la fête Saint-Michel, que je lui ferai voir une troupe d’hommes armés qui ravageront sa terre comme le loup une bergerie. Don Pierre, vous me direz à Charles Martel que jamais il n’a ôté de son manteau un tel morceau de fourrure (?)[1] c’est pour son malheur qu’il a eu une telle idée, le félon ; puisqu’il ose m’attaquer, à mon tour je le défie ! »

272. « Girart, que réclamez-vous au roi Charles ? — Moi ! la mort de mon oncle Odilon, celle de mon père, le duc Drogon, tous deux tués par le duc Thierri en Vaubeton. Il nous jette hors de sa fidélité[2], moi et Boson ; sans motif, il occupe notre terre : s’il ne me fait pas un accord qui soit bon, porte-lui notre défi. »

273. Pierre, entendant ces mots, fit un pas en avant. Il lui parut qu’il y avait là de l’orgueil, de la colère, de la rancune, de la haine, de la malice, de la folie : « Oses-tu bien mander un tel défi à ton seigneur ; le charger d’un tel grief ? C’est lui qui a voulu qu’accord et mutuel pardon eussent lieu. La paix avait été faite en Vaubeton. Par la mort de Thierri, le duc d’Ascane, que votre cousin Boson tua de sa lance, vous avez recommencé la guerre. Le plus gros de la perte sera pour vous, et vous finirez par faire droit au roi point par point. »

274[3]. — Je vais te dire une chose, Pierre de Mont-Rabei, tandis que je te vois ici. Charles me fait grand tort et grande injustice en me mandant de venir faire droit à Soissons, ou à Reims, à Saint-Remi. Avant qu’il ait mis la main sur ma terre, il y a une chose dont il peut être sûr[4], c’est qu’il n’est pas près d’obtenir droit de moi, si d’abord il ne me tient prisonnier à sa discrétion. — Tant pis ! » dit Pierre.

  1. C’est-à-dire. « jamais il ne se sera fait un tort aussi grand.
  2. Cf. p. 115, n. 1.
  3. Tirade omise dans L.
  4. Mot à mot « qu’il peut nouer en sa courroie », comme au § 232.