Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 3.djvu/50

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bientôt obligé de capituler. La ville fut mise au pillage, et trois cents sénateurs furent condamnés à mourir, pour expier l’attachement qu’ils avaient montré au frère d’Antoine. Ils invoquèrent l’humanité d’Octave, qui se contenta de leur répondre : « Il faut que vous mourriez. » Ce massacre fut présenté comme une offrande pieuse, offerte à un autel élevé aux mânes de Jules César déifié. Antoine, revenu en Italie, fit, avec Octave, un nouvel accord, par lequel ils se partagèrent le monde romain, laissant à Lépide les provinces d’Afrique. Dans ce partage, Octave eut Rome et les provinces de l’ouest. Alors les proscriptions commencèrent à s’arrêter ; Octave laissa revenir les proscrits qui avaient échappé à la mort, et qui ne pouvaient plus lui faire ombrage ; la paix qu’il avait rendue à l’empire romain ne fut troublée que par la révolte de quelques provinces des Gaules, qu’il alla pacifier en personne, et par la guerre maritime de Sextus Pompée, qui dura plusieurs années, et qui fut mêlée de revers et de triomphes. Octave ne pardonna point à Neptune d’avoir favorisé Pompée dans quelques rencontres ; et, long-temps après, il fit enlever sa statue du cirque où l’on célébrait des jeux publics. Ce fut à son retour des Gaules qu’il épousa la fameuse Livie, alors femme de Claudius Néron, qu’il obligea de divorcer, après avoir répudié lui-même Scribonia, sa troisième femme. Trois mois après son mariage, Livie, déjà mère d’une fille, donna le jour à un fils, nommé Tibère, qui, dans la suite, devint empereur. Bientôt le monde romain n’eut plus que deux maîtres. Dans la guerre contre Sextus Pompée, Lépide, qui était venu en Sicile, avec une armée, eut quelques differends avec Octave ; il voulut faire valoir ses droits à l’autorité ; mais le caractère de ce triumvir était si insignifiant, que toute son armée se rangea sous les ordres d’Octave, qui, dans cette affaire, montra beaucoup de prudence et de présence d’esprit. Lépide fut dépouillé de son autorité triumvirale, et il parut si méprisable, qu’on lui permit de vivre. Octave devait bientôt n’avoir plus de rivaux à l’empire. Antoine, qui avait l’Orient, semblait avoir pris les mœurs des peuples soumis à sa domination ; et, quoiqu’avancé en âge, il se livrait à l’amour et à la volupté, tandis que le jeune Octave se montrait un véritable homme d’état, marchant toujours à son but, et profitant de chaque faute de son collégue. Il avait l’avantage très-important de voir Rome dans son partage, cette ville dont le monde était accoutumé à recevoir des lois ; il sut en profiter, et s’appliqua à se faire aimer du peuple, dont il méritait en quelques points la reconnaissance, pour avoir rendu à l’Italie l’abondance et la paix. La générosité ou la prudence, qui lui fit jeter au feu, sans les ouvrir, plusieurs lettres de sénateurs trouvées parmi les papiers de Pompée, parurent annoncer un gouvernement plus doux ; il ajouta encore à sa popularité, en déclarant solennellement qu’il résignerait la puissance suprême, aussitôt qu’Antoine reviendrait de la guerre contre les Parthes. On s’attachait d’autant plus à lui, qu’il avait l’air de dédaigner le pouvoir ; il parut permettre, plutôt que demander, qu’on le revêtît du titre de tribun perpétuel, qualité populaire, et qui fut son premier pas pour arriver à la puissance suprême. A mesure qu’il se rapprochait du peuple romain, il se déclarait plus ouvertement contre Antoine. Profitant de tou-