Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 84.djvu/23

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caractère, y prit peu de part ; mais trop franc pour dissimuler, il laissa quelquefois pénétrer sa pensée. On l’envoya d’abord en Italie, où il commanda une division sous les ordres de Murat. Il ne revint en France que vers la fin de 1802, pour cause de santé. C’était le temps où Napoléon marchait ouvertement au pouvoir absolu ; Tharreau le comprit sans peine. Admirateur très sincère de son talent, il ne vit qu’avec peine le projet de changer la forme d’un gouvernement pour lequel il avait si longtemps combattu, et refusa sa signature, quand il fut question de voter pour le consulat. Quelques jours après, le ministre de la guerre le mit hors de service en lui écrivant toutefois dans un style poli : « Je vous préviens que, d’après le travail arrêté par le premier Consul, vous êtes en activité. Vous restez à la disposition du gouvernement, et jouirez, en attendant une destination, du traitement de 15,000 francs. Croyez au plaisir que j’ai à vous transmettre cette preuve de l’estime du gouvernement et de la considération qu’il attache à vos services. » Lorsqu’il fut question de l’élection à l’empire, Tharreau opposa d’abord la même résistance, mais quand l’Empereur fut définitivement proclamé, il n’hésita pas à lui prêter serment. Depuis cette époque, il fut laissé chez lui dans la même position, recevant très régulièrement le même traitement. A chaque époque où il vit recommencer la guerre, il écrivit pour offrir ses services, mais on n’y répondit pas. Cependant un peu avant le manifeste contre la Prusse, le prince Joseph étant venu à Strasbourg, Tharreau fit plusieurs reconnaissances militaires avec lui, et il en reçut quelques témoignages d’estime. Ce prince lui écrivit ensuite de Paris : « J’espère que vos vœux seront remplis, et je m’en féliciterai. » Cette lettre lui fit concevoir l’espérance d’être prochainement employé ; mais il lui fut impossible d’en faire la demande à l’empereur, qui, peu de temps après, passa par Strasbourg. Désespéré de ce contretemps, et voyant que la guerre avec la Russie allait commencer, il écrivit au ministre de la guerre, que n’étant point habitué à entendre tirer le canon d’aussi près, sans être de la partie, il allait se rendre à Poitiers pour affaires de famille. Il n’avait point reçu de réponse à cette lettre quand, à son grand étonnement, il fut nommé baron, et s’étant rendu à Paris pour remercier l’Empereur et lui réitérer ses offres de service, il fut très bien reçu et nommé commandant de la première division des grenadiers, aux ordres du maréchal Oudinot, ce que Napoléon lui annonga très gracieusement en disant : « A présent vous voila à même de réparer le temps perdu. » La guerre d’Autriche en 1809, commença bientôt, et dès le début, en entrant à Vienne, Tharreau fut blessé assez grièvement pour qu’on ne le regardât, comme hors de danger, que le quinzième jour. Ayant alors appris que sa division allait passer le Danube, il essaya ses forces en voiture, et trois jours après il la rejoignit sur la rive gauche du fleuve, au moment où le général Régnier venait le remplacer par ordre de l’empereur : « Mais vous n’êtes pas de fer, lui dit Napoléon, qui était présent ; la journée sera chaude ; vous ne pourrez