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manda que le ministre de la guerre fut interpellé, pour savoir s’il avait ordonné de fournir une escorte à Mesdames : « Dans ce cas, continua le duc, je le « dénonce comme auteur d’un délit grave, et comme « ayant porté atteinte à la constitution. » Quelques jours après, et par suite de cette affaire, il réclama une loi sur la résidence de la famille royale. Lors de la fuite de Louis XVI. ce fut lui qui présenta à l’assemblée la lettre par laquelle le duc d’Aumont l’assurait de son dévouement. Le 13 août, il renouvela la proposition faite précédemment et tendant à décréter que le roi et l’héritier présomptif de la Couronne ne pourraient jamais commander les armées. Il remplaça, au commencement de 1792, le général Custines dans le commandement de l’armée employée dans les gorges de Porentrui. Il resta à cette armée jusqu’après le 10 août. Alors une lettre qu’il écrivait à Barnave, et où l’assemblée était qualifiée d’usurpatrice, ayant été saisie, elle devint le motif d’un décret d’accusation contre lui. Il sortit de France, fut accusé par Viard d’être à Londres membre d’une coterie d’émigrés intriguant contre la France, ce qu’il nia par une lettre insérée dans le Moniteur, au commencement de 1793. Après s’être fait remarquer par ses opinions contre le roi, on ne le voit pas sans étonnement traiter d’usurpatrice l’assemblée qui renverse le trône. Pour expliquer cette contradiction, on a prétendu qu’un ressentiment particulier contre la reine avait jeté d’Aiguillon dans le parti démocratique, où son peu d’habileté ne lui permit pas de jouer un rôle supérieur. On ajoute que son patriotisme, quels qu’en eussent été d’ailleurs l’origine et le mobile, échoua tout à fait lorsqu’il fut question d’appliquer aux colonies les principes de la constitution. Il est certain, au reste, que l’époque de la révision ramena vers la cour une grande partie de la minorité de la noblesse, et que d’Aiguillon perdit dès lors la réputation que lui avaient acquise ses opinions précédentes. À partir de cette époque, il disparut de la scène politique. Pendant son émigration, il habita longtemps Hambourg avec ses amis les frères de Lameth, et mourut dans cette ville, le 4 mai 1800, au moment de rentrer en France par sa radiation de la liste des émigrés. M-d j.


AIKIN (John), médecin et littérateur anglais, né en 1747, à Kibworth, en Leicestershire, était fils d’un instituteur et ministre presbytérien. Destiné de bonne heure à l’art de guérir, il reçut d’abord les leçons d’un opérateur célèbre, C. White, de Manchester, qui lui procura la première occasion de se faire connaître, en insérant parmi ses Observations chirurgicales (Cases in surgery), un essai de son élève sur la ligature des artères. Aikin s’établit à Chester comme chirurgien : en 1771, il se réunit à sa famille, à Warrington, en Lancashire, et se maria l’année suivante. Une chaire de chimie et de physiologie lui fut donnée dans l’école que dirigeait son père ; mais trouvant peu d’avantages à exercer sa profession, il alla prendre à Leyde un degré en médecine, et revint s’essayer dans un champ plus vaste, à Yarmouth, en Norfolk. Là sa clientèle s’étendit un peu. Il y forma une société littéraire, et vécut heureux au milieu de ses livres et d’honorables amis, jusqu’au moment ou le cri de liberté proféré en France commença à retentir dans les îles Britanniques. Aikin s’était déjà rendu suspect au gouvernement de son pays par l’ardeur qu’il avait mise à faire révoquer, en faveur de ses coreligionnaires, les actes de test et corporation, qui les excluaient des emplois publics. La notoriété de ses opinions, favorables aux idées appelées nouvelles, rendit moins tranquille son séjour à Yarmouth, et il crut devoir, en 1792, transférer sa résidence a Londres. Le cercle assez limité de sa clientèle lui avait laissé beaucoup de loisir pour s’adonner à la culture des lettres : sa plume s’exerçait alternativement sur la chimie, la biographie, la morale et l’art du chansonnier. Il avait publié un grand nombre de productions, recommandables surtout par l’utilité de leur objet, par leur tendance morale, par le naturel, la correction et l’agrément du style, lorsqu’on lui proposa la direction d’un nouvel ouvrage périodique, le Monthly Magazine, qui fut enrichi de ses écrits, depuis 1796 jusqu’en 1806. Il a été l’éditeur et le principal rédacteur d’une Biographie générale, en 10 volumes in-4o, dont le premier parut en 1799 et le dernier en 1813. Les divers collaborateurs, Aikin, Entield, Micholson, Thomas Morgan, William Johnston et autres, ont puisé leurs matériaux à de bonnes sources, et présenté les faits avec impartialité et simplicité. Leur ouvrage a fourni d’utiles documents aux auteurs de la Biographie universelle. La robuste constitution d’Aikin s’était considérablement affaiblie par des veilles prolongées dans le cabinet et dans le monde, où l’agrément et la sûreté. de son commerce le faisaient rechercher. Ses facultés intellectuelles s’altérèrent plusieurs années avant sa mort, arrivée le 1er décembre 1822, à Stoke-Newington. Au nombre de ses amis étaient Priesley, les historiens Henry et Boscoe, et le philanthrope Howard. Presque toute sa famille cultivait la littérature. Sa fille Lucy, à qui l’on doit des mémoires sur la cour d’Élisabeth, a publié des mémoires sur la vie de son père, avec un choix de ses écrits, et un portrait, 1823, 2 vol. in-8o. Rappelons ici ceux des ouvrages d’Aikin que nous n’avons pas mentionnés : Observations sur l’usage extérieur des préparations de plomb. — Observations sur les hôpitaux, trad. en français, par Verlac, 1787, in-12. — Mémoires biographiques de la médecine dans la Grande-Bretagne, jusqu’au temps d’Harvey, 1780, in-8o. — Une édition, très-augmentée, de la Materia medica de Lewis. — Esquisse de l’économie animale. — Essai sur la composition des chansons (song-writing), in·12. — Pièces diverses en prose, conjointement avec sa sœur, miss Aikin (depuis madame Barbauld), 1775, in-8o. Cette dame a inséré aussi quelques morceaux dans les deux premiers volumes des Soirées au logis, ouvrage publié par son frère, de 1793 à 1795, en 6 volumes, et dont le succès se soutient toujours. Il a été traduit en français, 6 vol. in-t2, sur la 12e édition ; une 14e a paru en 1827, 4 vol. ─ Textes de Chimie ; Manuel de chimie, trad. de Baumé. ─ Essai sur l’application de l’histoire