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et qu’elle s’amusait à faire de petites boules de cire qu’elle avait l’habitude de porter à sa bouche. Son carrossier déposa qu’il l’avait vu sacrifier un coq dans une église, à minuit, et le procureur-général prouva, par divers passages des livres juifs, que cette oblation d’un coq était une pratique tout-à-la fois juive et païenne. Enfin on ajouta encore à ces ridicules témoignages, que la maréchale, superstitieuse au point qu’elle ne voulait pas que certaines personnes la regardassent, disant qu’elles allaient l’ensorceler, consultait souvent, sur le sort de son fils, une femme nommée Isabelle, regardée comme sorcière. Ces révélations lui furent imputées à crime. Des Agnus Dei, des images que, dans la faiblesse qu’elle avait de se croire ensorcelée, elle regardait comme des préservatifs contre le pouvoir du démon, servirent de témoignages contre elle. On crut découvrir dans quelques livres hébreux, saisis dans son cabinet le moyen dont elle s’était servie pour obtenir un si grand ascendant sur les volontés de la reine. Interrogée sur ce point, elle répondit : « Mon sortilège a été le pouvoir que doivent avoir les âmes fortes sur les esprits faibles. » Quelques juges eurent assez d’équité et de lumières pour ne pas opiner à la mort ; Orlando Pagen, l’un des deux rapporteurs, refusa de signer l’arrêt que Courtin, vendu à Charles de Luynes, lui présenta ; cinq juges s’absentèrent, d’autres conclurent au bannissement ; mais le reste, entraîné par le préjugé public, par l’ignorance, et surtout par les instigations de ceux qui voulaient recueillir les dépouilles du maréchal et de sa femme, signèrent l’arrêt de mort, et il fut prononcé, le 8 juillet 1617, devant une foule immense, venue pour examiner la contenance de cette favorite, naguère toute-puissante. Galigaï, pendant cette lecture, baissa la tête, et voulut d’abord s’envelopper de ses coiffes ; mais on la contraignit d’entendre, à visage découvert, l’arrêt qui la condamnait à être brûlée. Pour en suspendre l’exécution, elle déclara qu’elle était enceinte ; mais on lui remontra que, d’après les dépositions qu’elle avait faites pendant son séjour à la Bastille, elle ne pouvait être dans cet état sans avoir manqué à son honneur. Cette objection l’empêcha d’insister : elle reprit son courage, et se résigna à la mort. Traînée au supplice le jour même de sa condamnation, elle passa au milieu d’un peuple nombreux, que son malheur commençait enfin à toucher ; elle vit sans effroi les flammes qui allaient dévorer son corps. « Intrépide, mais modeste, dit Anquetil, elle mourut sans bravade et sans frayeur. » On fit, sur sa mort une tragédie en quatre actes et en vers, intitulée : la Magicienne étrangère. Cette pièce, imprimée à Rouen, en 1617, n’est qu’une satire grossière. Une des singularités de la destinée de la maréchale d’Ancre, c’est qu’elle fut le premier mobile de la fortune du cardinal de Richelieu. (voy. Richelieu). B-y.


ANCUS MARTIUS, 4e roi de Rome, était petit-fils de Numa, par Pompilie, fille de ce prince. Après un court interrègne qui suivit la mort de Tullus Hostilius, il fut élu, l’an 113 de Rome (641 avant J.-C.). En montant sur le trône, il annonça des dispositions pacifiques, et s’appliqua à remettre en honneur les cérémonies religieuses. Les Latins, qui désiraient tirer avantage de la mort de son prédécesseur, l’obligèrent, par une attaque soudaine, à prendre les armes. Après leur avoir déclaré la guerre, avec les cérémonies prescrites par Numa, Ancus Martius prit Politorium, Tellène et Ficène, villes, ou pour mieux dire bourgades, dont il serait aujourd’hui impossible de déterminer la situation, mais qui étaient peu éloignées de Rome, et vers l’embouchure du Tibre ; il les détruisit, et en transporta à Rome les habitants, auxquels, par une sage politique, il accorda le droit de cité. Les Latins tentèrent de se venger ; mais Ancus les défit en bataille rangée. Les Fidénates, les Velens, les Sabins et les Volsques, ne furent pas plus heureux. Il prit la ville du premier de ces peuples, en pratiquant des chemins sous terre, genre d’attaque dont l’histoire de Rome fait ici mention pour la première fois. Ayant ensuite vaincu deux fois les Velens, Ancus obtint du sénat les honneurs du triomphe. Sous son règne, le mont Aventin et le mont Janicule furent enfermés dans l’enceinte de Rome. Pour joindre le Janicule à la ville, dont il était la citadelle, Ancus fit construire sur le Tibre le pont Sublicius. Il fit bâtir une prison dans la place publique ; le port et la ville d’Ostie lui druent leur origine. Il fit creuser des salines, et en distribua le sel au peuple : ce fut l’origine des libéralités publiques, connues dans la suite sous le nom de congiaria. Au nombre des monuments publics élevés par ses ordres, on doit placer le temple de Jupiter Férétrien, l’aqueduc magnifique, dit de l’Aqua Martia, qui, dans la suite, ne suffisant pas aux besoins de Rome, fut augmenté par le préteur Q. Martius Rex, l’un des descendants de ce prince. Ancus Martins mourut après un règne de 24 ans. Plutarque prétend que sa mort fut violente ; mais les autres historiens ne partagent point cette opinion. Il laissa deux fils, dont l’aîné était âgé de quinze ans, et leur donna imprudemment pour tuteur Tarquin, nouvellement établi à Rome. Si l’on en croyait Denys d’Halicarnasse, Ancus Martius n’aurait obtenu que par un crime le pouvoir suprême. Cet historien dit qu’il avait exterminé Tullus Hostilius avec toute sa famille, lorsque ce prince offrait un sacrifice domestique. D-t.


ANCWITZ (le comte), nonce du palatinat de Cracovie, et député, de l’ordre équestre à la diète polonaise, né vers 1750, de l’une des familles les plus distinguées de la Pologne, reçut une brillante éducation, et se fit remarquer dès son début dans la carrière politique par une éloquence peu commune. Nommé ambassadeur extraordinaire de la république polonaise à la cour de Copenhague, en 1792, après l’insurrection qui avait éclaté contre les Prussiens et les Russes, il obtint peu de résultats dans une mission d’ailleurs de peu d’importance, et revint à Varsovie dans le mois de novembre suivant. Il se rendit bientôt à Grodno, où il fit l’ouverture, de la diète, le 17 juin 1793, et fut un des membres les plus influents de cette assemblée. Il prit aussi une grande part aux négociations et aux intrigues qui amenèrent le second partage de la Pologne.