Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 2.djvu/159

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
154
ARC

ses faiblesses et ses goûts. Aussi Arcésilas, malgré son scepticisme, ne fut point ennemi des plaisirs ; et son humeur libérale, à laquelle sa fortune et les faveurs d’Eumènes, roi de Pergame, lui permettaient de se livrer, le rendit cher à ses concitoyens. Dans les secours qu’il portait aux indigents, il savait mettre cette délicasse si rare qui double le prix du bienfait. Émule d’Aristippe, il partagea son temps entre l’Amour, Bacchus et les Muses, sans jamais se mêler des affaires publiques. Il était enthousiaste de Pindare et d’Homère, et, lorsqu’il se livrait à la lecture de ce dernier, il avait coutume de dire qu’il allait chez sa maîtresse. Ce philosophe aimable et bizarre eut une fin bien digne de lui : il mourut, si l’on en croit l’histoire, d’un excès de vin, à l’âge de 75 ans, la quatrième année de la 134e olympiade. Il eut pour successeur Lacydes. — On compte trois autres Arcésilaus : l’un, poëte de l’ancienne comédie ; l’autre, élégiaque ; le troisième, statuaire, fils d’Aristodicus. D. l.


ARCÉSILAUS, peintre grec, était de Pharos, et contemporain de Polygnote : il peignait à l’encaustique. On voyait au Pyrée un tableau dans lequel il avait représenté Léosthènes et ses enfants. — Il y eut aussi à Rome un statuaire du même nom, qui vivait 65 ans avant J.-C. Lucullus l’aimait et lui fit faire plusieurs ouvrages ; on les payait plus cher que ceux des autres artistes. Varron en parle avec éloge ; il cite un groupe de marbre, d’un seul morceau, de la main d’Arcésilaus, et représentant une bonne avec laquelle jouaient des Amours ailes. L-S-e.


ARCET. Voyez Darcert.


ARCHAGATHUS, premier médecin grec qui vint s’établir à Rome, l’an 554 de la fondation de cette ville, 219 ans avant J.-C. Pline l’Ancien, de qui nous tenons ce fait, s’exprime ainsi au sujet d’Archagathus : « Cassius Hemina, auteur très-ancien, nous apprend que le premier médecin à Rome fut Archagathus, fils de Lysanius ; qu’il y vint du Péloponèse, sous le consulat de L. Emilius et de M. Livius, l’an 535 de la fondation de la ville[1] ; qu’il fut investi des droits de citoyen romain, et reçut, aux frais de l’État, une boutique dans le carrefour Acilius pour y pratiquer son art ; qu’il fut nommé le Vulnéraire (guérisseur de plaies), en raison de son talent ; et que, dans les premiers temps de son arrivée, il fut merveilleusement accueilli ; mais que bientôt, à force de tailler et de brûler, il s’attira le surnom de bourreau, et fit prendre en aversion la médecine et tous les médecins. »[2]. Cette haine néanmoins fut peu durable, et Asclépiade acquit bientôt aux savants de cette profession la considération de ce peuple, plus militaire qu’éclairé. On a aussi donné a ce médecin le nom d’Areegathus ; ce qui a trompé des biographes qui, par erreur, en ont fait deux personnages différents. C. et A-n.


ARCHÉLAUS, roi de Macédoine, était fils naturel de Perdiccas, et d’une esclave d’Alcétas, son frère. Perdiccas, en mourant, le laissa tuteur d’Alcétas, fils légitime qu’il avait eu de Cléopâtre, son épouse, et qui n’avait que sept ans. Archélaus, voulant s’emparer du trône, commença par mander Alcétas son oncle, et Alexandre son fils, comme s’il eut voulu leur rendre la couronne que Perdiccas avait usurpée. Ces infortunés furent assez crédules pour se rendre à cette invitation ; Archélaus les fit égorger, jeta dans un puits Alcétas, son jeune frère, puis écrivit à sa mère qu’il y était tombé en poursuivant une oie. Après s’être ainsi ouvert le chemin du trône, il sembla vouloir faire oublier par sa conduite les moyens qu’il avait employés pour y parvenir, et se distingua par sa modération. La Macédoine était sans cesse exposée aux ravages des peuples voisins ; il fit construire des places fortes et ouvrit des grandes routes. Il fit des amas considérables d’armes, et se procura des chevaux pour monter sa cavalerie. Il fit même construire des vaisseaux pour s’opposer aux incursions des Athéniens ; et comme Pydne, ville maritime de la Macédoine, leur servait de point de débarquement, il s’en empara, malgré leurs efforts, et en transporta les habitants dans l’intérieur. Il aimait les arts et les lettres ; car il dépensa 7 talents (environ 40,000 fr.) à faire peindre son palais par Zeuxis, qui lui reconnut sans doute un goût réel pour la peinture, puisqu’il lui fit présent, par la suite, de son tableau de Pan. Archélaus fit venir à sa cour Euripide et Agathon, deux poètes tragiques célèbres. Il voulut aussi y attirer Socrate ; mais ce philosophe ne se rendit pas à son invitation. Il fut victime d’une conspiration formée par Cratiæus, à qui il avait promis en mariage une de ses filles donnée ensuite à un autre ; par Hellanocrates de Larisse, qu’il avait abusé en lui faisant la promesse de le rétablir dans ses États, et par Décamnichus, l’un de ses courtisans, qu’il avait livré à la vengeance d’Euripide. Il fut assassiné, l’an 398 avant J-C., après avoir régné 14 ans, et laissa un fils en bas âge, nommé Oreste. C-r.


ARCHÉLAUS, né dans la Cappadoce, devint l’un des plus habiles généraux de Mithridate, qu’il servit avec zèle dans sa première guerre contre les Romains. Ce prince l’ayant ensuite envoyé en Grèce,

  1. Le texte de Pline aura probablement été altéré en cet endroit ; la date 535 qu’il donne est erronée ; le consulat de M. Livius Salinator et de L. Emilius Paulus est rapporté par tous les historiens à l’année qui précéda immédiatement la seconde guerre panique (217 avant J.-C.. ou 534 de Rome). C. W-r.
  2. Est-il croyable que la nation romaine, placée entre deux foyers de civilisation. l’Étrurie et la Grèce, ait existe près de cinq cents ans avant de connaître et de pratiquer la médecine ? que, pendant cette longue suite d’années. elle ait fait continuellement la guerre, sans étudier les moyens de secourir les malheureux qu’atteignait le fer ennemi ! Non. D’ailleurs, l’assertion du chroniqueur cité par Pline est formellement contredite par un passage de Denys d’Halicarnasse. Cet historien, dont le témoignage est bien plus digne de foi. raconte, au 10e livre de ses Antiquités romaines, que, lors de la peste qui dépeupla Rome, l’an 301, les médecins ne suffirent pas à la multitude des malades. Ainsi Rome possédait des médecins plus de deux siècles avant Archagathus ; mais ce dernier, en initiant les Romains aux travaux d’Hippocrate, d’Herophile, d’Érasistrate, fit faire un pas immense a l’art de guérir chez ce peuple où il devait être peu avancé, puisque Caton le Censeur, esprit éminemment observateur et critique, ne savait pas d’autre remède pour la guérison de luxations que de prononcer ces quatre mots mystérieux : saries, dardaries, astaturies, dissunapiter.