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para, et se trouvait encore, en 1711, au siége de Barcelone ; mais il ne put contribuer à la prise de cette place importante, parce qu’il revint en France pour prendre possession de la charge de gouverneur général du Berri, dont il avait été pourvu après la démission du duc de Noailles. Il mourut le 21 août 1736. De trois enfants qu’il eut de son mariage avec Charlotte le Bas de Montargis, deux fils moururent en bas âge, et Anne-Claude d’Arpajon, sa fille, épousa le second fils du duc de Noailles. Elle fut appelée, à défaut de mâles, à jouir de la prérogative qui avait été accordée à son bisaïeul par Jean-Paul Lascaris (voy. l’art. précéd.), et fut reçue en conséquence grand-croix de l’ordre de Malte, lorsqu’elle eut atteint l’âge de seize ans. Elle transmit ce privilège à la maison de Noailles. Ainsi s’éteignit la maison d’Arpajon, issue des anciens comtes de Toulouse, et qui, par son alliance avec celle de Séverac[1], tirait son origine des rois d’Aragon, comtes de Barcelone, et d’une princesse d’Irlande. L-m-x.


ARPE (Pierre-Frédéric), jurisconsulte et philologue distingué, mais qui s’est trop occupé dans ses recherches de choses futiles ou singulières, naquit en 1682, à Kiell dans le Holstein. Il apprit de son père, qui remplissait dans cette ville les fonctions de consul, les premiers éléments des langues et de la littérature. Après avoir achevé ses études au gymnase, puis à l’université de Kiell, il se rendit à Copenhague pour y perfectionner ses connaissances, et peut-être aussi pour y trouver un emploi que la médiocrité de sa fortune lui rendit nécessaire. Placé près d’un jeune soigneur pour l’aider dans ses études, il sut se concilier dans ce poste la bienveillance des parents de son élève et l’estime des personnes du rang le plus distingué. Le temps qu’il vécut à Copenhague ne fut point perdu pour sa propre instruction. Il employait ses loisirs à suivre les cours des plus habiles professeurs, et à recueillir dans les bibliothèques des matériaux pour les ouvrages qu’il se proposait de publier dans la suite. S’étant charge d’une seconde éducation, il accompagne son nouvel élève à l’académie de Wolfenbuttel, puis en Hollande, où il publia, mais en gardant l’anonyme, son apologie de Vanini. (Voy. ce nom.) Cet ouvrage, soit qu’on le regarde comme un jeu d’esprit, soit qu’on le prenne au sérieux, n’offre rien de plus singulier, ni de plus hardi que son titre. Le but de l’auteur est de prouver qu’on a eu tort de regarder Vanini comme un athée, et que par conséquent sa condamnation fut injuste. Avant lui, Bayle[2] avait soutenu la même opinion dans les Pensées diverses sur la comète. Ainsi l’apologiste de Vanini n’avait pas même l’avantage de dire une chose nouvelle, et le titre seul de son livre en assura le succès. Au surplus ce livre ne fit aucun tort à l’auteur, qui pourtant fut bien connu. Il en préparait une seconde édition, lorsqu’il fut rappelé en 1717 à Kiell pour y professer le droit. Il se démit de sa chaire en 1722, afin de pouvoir se livrer entièrement à la rédaction des nombreux ouvrages dont il se proposait d’enrichir la littérature. Il se retira quelque temps après à Hambourg ; et il y passa le reste de sa vie, formant sans cesse de nouveaux projets, qui sont restés presque tous sans exécution. Arpe mourut en 1748, à l’âge de 66 ans. Il avait beaucoup d’érudition et une vaste mémoire ; mais on doit lui reprocher d’avoir employé son temps à des recherches frivoles. Il était l’ami du savant Mosheim, de Z.-C. Uffenbach, etc. On trouve deux lettres de lui dans le tome 2 du Commercium epistolare d’Uffenbach, publié par Schelhorn. On connaît de lui les ouvrages suivants : 1° I. P. F. R. P. epistolarum Decor, sive brevis Delineatio Musæi scriptorum de divinatione, majoria operis prodromus, Wolfenbuttel, in-8o de 66 pages[3]. Arpe n’a point publié l’ouvrage qu’il annonçait sur la divination, et qui pouvait être fort curieux. 2° Pyrrhonismi historici, sive observationum de historia et historicis antiquis Argumentum, ibid., 1711, in-8o de 24 pages. C’est encore le prodrome ou le plan d’un ouvrage dans lequel Arpe se proposait de montrer l’incertitude qui règne dans les récits des historiens de l’antiquité ; mais, malgré les sollicitations de ses amis, il ne l’a jamais exécuté. 3° Apologia pro Cæasare Vanino, Cosmopoli (Rotterdam), 1712, in-8o. Ce livre, qui fit beaucoup de bruit à son apparition, est presque oublié maintenant. Arpe est convenu avec Mosheim qu’il ne l’avait composé que pour exercer son esprit, et qu’il n’avait jamais eu la prétention de justifier Vanini ; mais il déclara, dans ses Feriæ æstivales, p. 30, qu’en publiant l’apologie de Vanini, il n’avait été guidé que par l’amour de la vérité et le désir d’être utile aux hommes, en combattant de tout son pouvoir la superstition. Quoi qu’il en soit, il annonçait en 1717 une seconde édition de cet ouvrage, avec des notes[4] ; et en 1728, il écrivait à Uffenbach qu’il allait réimprimer l’apologie de Vanini, avec son procès, dont un avocat de Toulouse lui avait fait passer une copie ; mais ce projet n’a pas été réalise. 4° Theatrum fati, sive Notitia scriptorum de providentia, fortune et fato, Rotterdam, 1712, in-8o ; c’est un catalogue chronologique des auteurs qui ont écrit sur le destin ou la providence, depuis Hermès jusqu’à J.-Conrad Rhumet, en 1632. 5° De prodigiosis naturæ et artis operibus talismanes et amuleta dictis, cum recensione scriptorum Indus ar-

  1. La maison de Séverac, dont un des chefs mourut maréchal de France, en 1427, existe encore, mais déchue de son rang et de sa fortune, dans la petite ville de St-Felix de Caraman (Haute-Garonne).
  2. Barbier, dans son Examen critique du dictionnaires, dit qu’Arpe se lia dans la Belgique avec Vitrlarius, Noodt, Bayle et Basnage. Puis il ajoute que ces grands hommes conçurent de l’estime pour lui et lui conseillèrent de publier l’apoloie de Vanini, dont il s’occupait. Arpe vint au plus tôt en Hollande sur la fin de 1711. À cette époque, Bayle et Basnage étaient morts depuis plusieurs années. Quant à Vitriarius et Noodt, il est plus que douteux qu’ils aient jamais donné à un jeune homme qui venait suivre leurs leçons le perniceux conseil de publier un ouvrage qui ne devait avoir d’autre effet que de causer du scandale.
  3. Barbier n’a pas connu cet ouvrage, puisqu’il ne le site pas dans son Dict. des anonymes. Dans son art. Arpe, il change le titre en celui de Biblioyhteca fatidica.
  4. On pourrait conjecturer, d’après une lettre de Mosheim à la Croze, que la seconde édition était sous presse en 1747 ; mais il est probable qu’elle n’a pas été terminée. Barbier cite cependant une édition de 1718 ; mais on ne la trouve dans aucun catalogue.