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en vers ïambiques sur l’explication des songes, qu’on trouve en grec et en latin à la suite d’Artémidore, dans l’édition donnée par Rigault. Il avait aussi écrit, suivant Suidas, un traité sur les maladies des ânes. L’époque à laquelle il a vécu nous est absolument inconnue ; on voit seulement par son style qu’il était du Bas-Empire. C-r.


ASTRONOME (l’). On désigne ainsi l’auteur anonyme de la Vie de Louis le Debonnaire. Pierre Delalande (Supplément aux conciles des Gaules) assure avoir lu dans un manuscrit du couvent de St-Trou que le nom de l’Astronome était Luitwolf. Nous n’avons aucun moyen de vérifier cette assertion. Tout ce que nous savons sur cet historien, c’est qu’il fut l’un des deux astronomes consultés par Louis le Débonnaire sur la comète qui parut en 857. « Au milieu de ces saints jours, écrit-il, un phénomène toujours funeste et d’un triste présage, je veux dire une comète, partit au ciel sous le signe de la Vierge, en cet endroit où se réunissent sous son manteau la queue du Serpent et le Corbeau. Ce météore, qui ne marchait point, comme les sept étoiles errantes, vers l’orient, après avoir, dans l’espace de vingt jours, ce qui est miraculeux, traversé les signes du Lion, du Cancer, des Gémeaux, vint enfin déposer à la tête du Taureau et sous les pieds du Cocher le globe de feu et la multitude de rayons qu’il avait jusque-là portés de tous côtés. Dès que l’empereur, très-attentif à ces sortes de phénomènes, eut le premier aperçu celui-ci, il ne se donna plus aucun repos qu’il n’eût fait appeler devant lui un certain savant et moi-même qui écris ceci et qui passais pour avoir quelque science dans ces choses. » Son ouvrage est d’un grand prix pour l’histoire ; il embrasse un intervalle de soixante-deux ans, de 778 à 840. C’est le document le plus complet que nous possédions sur le règne et le caractère du successeur de Charlemagne. Quant aux sources où il a puisé les faits qu’il raconte, l’auteur a soin de nous les indiquer, lui-même dans sa préface. « Ce que j’ai écrit, dit-il, pour arriver jusqu’aux temps de l’empire, je l’ai appris du récit du très-noble et très-dévot moine Adhémar[1], qui vécut contemporain de Charles le Grand, et fut élevé avec lui. Pour le temps qui suit, ayant assisté aux événements arrivés dans le palais, j’ai rapporté ici tout ce que j’ai vu ou pu apprendre. » Une partie de la Vie de Louis le Débonnaire (à partir de l’an 829) fut publiée pour la première fois par Reuber, en 1584 ; Pithou la donna en entier en 1588 ; on la trouve dans les recueils de Freher, de Duchesne et de D. Bouquet. Elle a été traduite en français par le président Cousin, dans le t. 1er de son Histoire de l’empire d’occident ; et par M. Guizot, dans le t. 5 de sa Collection des mémoires relatifs à l’histoire de France. C. W-r.


ASTRUC (Jean), médecin distingué du 18e siècle, naquit à Sauves, dans le bas Languedoc, le 19 mars 1684. Il fit ses études à Montpellier, et manifeste de bonne heure cette force de mémoire, et ce degré de rectitude dans l’esprit qui, appliqué aux données certaines que présentent les livres, fait arriver à de grands succès d’érudition. C’est aussi à Montpellier qu’il étudia la médecine, et dans la faculté de cette ville qu’il fut reçu au baccalauréat en 1702, et au doctorat en 1703. Le système mécanique de Boërhaave s’établissait alors peu à peu sur les théories chimiques de Jacques Dubois, de Graaf et de Willis. Astruc, que la nature avait doué d’un esprit droit, mais non assez actif pour pressentir de lui-même aucune haute vérité, suivit cette fausse impulsion, et dans tout le cours de sa longue et laborieuse carrière, s’il se montra profond et habile dans la science des livres, il resta fort en arrière dans la voie rigoureuse de l’observation et de l’expérience : en un mot, sa médecine spéculative et pratique, au lieu d’être hippocratique, staalienne, vitale, fut entièrement mécanique et mathématique. Cependant peu d’hommes ont obtenu parmi leurs contemporains une aussi grande réputation ; Astruc, sous le rapport théorique, la dut d’abord à son éloquence naturelle, et à un esprit de méthode qui, lui faisant diviser les sujets qu’il voulait développer, le faisait marcher d’une division à l’autre par des définitions rigoureuses, ce qui le rendait un professeur séduisant, en même temps que son zèle pour l’étude et sa prodigieuse mémoire en faisaient un homme érudit ; et, sous le rapport pratique, à un esprit de réserve et de circonspection qui prescrit le plus souvent au médecin, dans les maladies, une sage expectation, par laquelle il remplace, tant bien que mal, cette précieuse, mais rare qualité du tact médical. Astruc n’avait, dans sa théorie, aucune de ces vues grandes qui pénètrent jusqu’aux bases profondes d’une philosophie de la médecine, ni dans la pratique ce coup d’œil rapide et sûr qui juge, tout de suite et sans risque de la moindre erreur, les mouvements de la nature dans les maladies. Cela, en effet, ne se retrouve dans aucun des nombreux écrits qu’il a composés. Dès 1702, il publia une dissertation de motus fermentativi Causa, Montpellier, in-12, sur l’effervescence, qu’il expliquait par un fluide subtil, selon la philosophie cartésienne, théorie fautive comme on le voit, mais dans l’exposition de laquelle ou reconnaît déjà ce mérite particulier à l’auteur, de séduire ses lecteurs par une marche tellement méthodique, qu’elle fait croire à l’évidence des résultats, comme à la sévérité des raisonnements. L’illustre Vieussens la jugea digne d’une critique publique, à laquelle répondit, sinon victorieusement, au moins avec modestie, notre jeune auteur. De 1703 a 1710, Astruc se livra à des études solitaires, passant en revue tout le matériel de l’art ; cependant il commença a y faire une application des mathématiques, application plus spécieuse que solide, et dans laquelle il suivait l’exemple de ses maîtres Borelli et Bellini ; il imprime seulement deux mémoires, parmi ceux de l’académie des sciences de Montpellier, 1708, un sur les Pétrifications de Boutonnet, petit village près de Montpellier, et un intitulé : Conjectures sur le redressement des plantes inclinée à l’horizon. Il commença aussi alors la carrière de l’enseignement,

  1. M. Guizot pense qu’il veut parler d’Eginhard, dont le nom aurait été altéré par les copistes.