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des deux Incas crut qu’il pourrait se servir de ces étrangers contre son rival. Un envoyé d’Huascar vint demander, au nom de ce prince, des secours à Pizarre, qui déjà marchait vers le centre de l’empire, pour profiter de ces divisions, lorsque Huascar fut fait prisonnier par son frère, à la suite de deux batailles sanglantes. Maître de l’empire, Atahualpa fit égorger tous les princes du sang des Incas ; il envoya ensuite plusieurs ambassadeurs a Pizarre, avec de riches présents ; il ouvrit même une espèce de négociation avec les Espagnols, et consentit à recevoir Pizarre en qualité d’ambassadeur du roi d’Espagne, mais à condition qu’il sortirait incontinent de ses États. Pour toute réponse, Pizarre précipite sa marche à la tête de ses troupes, arrive à Caxamarca, et y attend l’Inca, qui était campé à deux lieues de cette ville, avec 20,000 Indiens. Le lendemain, 16 novembre 1532, l’empereur, voulant avoir une entrevue avec Pizarre, se présente avec un cortège magnifique. Pizarre fond aussitôt sur les Indiens, étonnés de cette perfidie, en fait un horrible massacre, et se saisit lui-même de l’empereur. Charge de chaînes, Atahualpa promit, pour prix de sa liberté, de remplir d’or une des salles de son palais, et les Péruviens s’empressaient d’apporter de quoi satisfaire a cette énorme rançon, lorsqu’une action cruelle de l’Inca fournit à Pizarre un prétexte pour s’en débarrasser. Atahualpa, craignant que les Espagnols ne rendissent la couronne à son frère, qu’il tenait toujours prisonnier, donna des ordres secrets pour qu’on le fit périr. Pizarre, irrité de ce meurtre, ou feignant de l’être, fit juger l’empereur du Pérou ; et, d’après des dépositions concertées, il le fit condamner à être brûlé vif, pour avoir usurpé l’autorité et fait assassiner son frère, et ordonnée ses sujets de massacrer les Espagnols. L’aumonier Valverde promit de faire adoucir ce jugement, si le malheureux Inca embrassait le christianisme. L’effroi soumit ce prince à la volonté de ses bourreaux ; il reçut le baptême, et on parut lui accorder une espèce de faveur en le faisant étrangler, en 1533, sur la place publique. B-p.


ATAIDE (Don Louis D’), comte d’Atougia, vice-roi des Indes, servit de bonne heure sous Étienne de Gama, et, s’étant distingué dans l’expédition de la mer Rouge, fut armé chevalier, par ce vice-roi, a l’âge de vingt-deux ans. De retour en Portugal, il fut envoyé en ambassade auprès de Charles-Quint, qu’il accompagna a la bataille de Muhlberg, en 1547, et il reçut de ce prince un cheval magnifique, en reconnaissance de ce qu’il l’avait aidé de ses conseils et de son bras dans cette fameuse journée. Ataïde fut nommé en 1569 vice-roi des Indes, au moment où toutes les puissances indiennes se lignaient pour chasser les Portugais de l’Asie. À son arrivée à Goa, ses officiers effrayés proposeront d’abandonner les possessions éloignées et de ne défendre que Goa. « Compagnons, leur dit Ataïde, je veux tout conserver ; et, tant que je vivrai, les ennemis ne gagneront pas un pouce de terrain. » Il expédia aussitôt des secours pour toutes les places menacées, et, opposant a un si grand nombre d’ennemis la force des armes et la politique, il contraignit Idalcan à lever le siége de Goa, vola au secours de Choul, et défit le Zamorin. Vainqueur de tous les princes de l’Inde, il rétablit l’ordre dans l’administration. De retour à Lisbonne, en 1575, il fut reçu, par Sébastien, sous un dais, avec les plus grands honneurs ; mais ce grand homme déplut bientôt à la cour par sa franchise, et il en fut éloigné. Cependant on eut encore besoin de ses services. Envoyé une seconde fois dans les Indes, en qualité de vice-roi, il mourut à Goa, en 1580, emportant les regrets de toute la nation portugaise, qu’il avait élevée au plus haut point de gloire dans l’Inde. B-p.


ATANAGI (Denis), né à Cagli, dans le duché d’Urbin, fut un des littérateurs italiens les plus célèbres, vers le milieu du 16e siècle. On ignore l’année précise de sa naissance ; on sait seulement que, vers l’au 1532, il se rendit à Rome, dans le dessein d’y tirer parti de ses connaissances littéraires pour se placer avantageusement ; il n’y put réussir, et, après avoir perdu vingt-cinq années en efforts inutiles et en vaines espérances, après avoir éprouvé des procès fâcheux, des maladies graves, en un mot, des contrariétés et des malheurs de toute espèce, il quitta Rome en octobre 1557, et retourna dans sa patrie, aussi pauvre qu’il en était sorti. À peine y était-il de retour, que la réputation dont il jouissait dans les lettres et la délicatesse connue de son goût le firent appeler à la cour d’Urbin pour revoir le poëme d’Amadis de Bernardo Tasso, père du Tasse. Bernardo, avant de le publier, désirait le soumettre à la censure d’Atanagi qui se rendit à ce désir, et passa cinq mois dans cette cour, occupé de la révision du poème de son ami, très-bien traité par le duc, mais souvent forcé, par sa mauvaise santé, d’interrompre ce travail. L’ayant enfin terminé, il fit un voyage à Venise, ou l’Amadis fut imprimé, sans doute par ses soins, en 1560. Atanagi passa le reste de sa vie dans cette ville, occupé de travaux pareils, de révisions, de corrections, d’éditions d’ouvrages, et tirant de ce qu’il recevait des auteurs et des libraires tous ses moyens d’exister. Il vécut ainsi dans un état toujours voisin de la pauvreté, mais indépendant et assez content de son sort. L’année de sa mort n’est pas plus certaine que celle de sa naissance. On voit seulement, par une de ses dédicaces, qu’il vivait encore en 1567, et par la dédicace d’un autre auteur, où il est parlé de sa mort, qu’elle était arrivée avant 1574. Les principaux ouvrages qu’il a publiés, soit composés par lui, soit seulement imprimés sous son nom, sont : 1o  Rhetoricorum Aristotelis, nec non paraphrasis Hermogenis Tabulæ, a Dionysio Athanasio collectæ, Venise, 1555, in-4o. 2o  Lettere famigliari di 13 uomini illustri rarcolti da Dionigi Atanagi, lib. 13, Rome 1554. in-8o. 3o  Rime di M. Bernardo Cappelle, Venise, 1560, in-4o, avec une longue épître dédicatoire de l’éditeur. 4o  Sonetti, Canzoni, Rime ed Egloghe pescatorie di Berardino Rota, Venise, 1561, in-8o. Il publia aussi les poésies latines du même auteur, avec une préface latine de sa composition, très-