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rencontrait, leur demandant leurs suffrages pour les places d’édile ou de tribun du peuple ; puis il s’asseyait sur la chaise curule, et s’occupait sérieusement à juger les causes qui étaient du ressort de ces magistratures. Bizarre dans ses générosités, il donnait aux uns des dés à jouer, des dattes et d’autres choses de nulle valeur ; il faisait à d’autres des présents magnifiques, sans les connaître. Tantôt il s’amusait à jeter sur son chemin des poignées d’or, en criant : « Attrape qui peut ; » tantôt il cachait des pierres sous sa robe de pourpre, et en accablait ceux qui le suivaient. Il s’amusa un jour à faire remplir de vin une fontaine d’Antioche. Il aimait à se baigner dans les bains publics, et s’y faisait apporter les huiles odorantes les plus précieuses. Quelqu’un ayant dit un jour que les rois étaient bien heureux de pouvoir faire usage de parfums pareils, le lendemain il lui en fit répandre un grand vase sur la tête. Antiochus avait pris, en montant sur le trône, le surnom de Theos Épiphanes (dieu présent). Ses extravagances firent qu’on le changea en celui d’Epimanes (fou). Cependant au milieu de toutes ses folies il ne négligea pas le soin de ses États, et Cléopâtre, sa sœur, qui était mariée à Ptolémée Philométor, étant morte l’an 175 avant J-C., il ne voulut plus laisser à ce prince les revenus de la Cælésyrie et de la Phénicie, qu’on lui avait donnés pour la dot de sa femme. Comme il sut qu’il se disposait à l’attaquer, il le prévint en allant porter la guerre en Égypte, et la conduisit avec tant d’activité, qu’il se serait emparé de ce royaume s’il n’avait été arrêté par les ordres des Romains, qui lui firent abandonner cette conquête. Très-zélé pour la religion, il entreprit de faire achever le temple de Jupiter Olympien à Athènes, envoya des offrandes magnifiques à Délos, à Olympie, et dans d’autres lieux. Par suite de ce zèle, il voulut forcer les Juifs à abandonner le culte de leur Dieu, pilla leur temple, et y fit placer la statue de Jupiter Olympien ; mais il ne put soumettre ce peuple à ses volontés, et se livra contre lui a toutes sortes de persécutions, ce qui fut la cause de la révolte des Machabées, qui défirent plusieurs fois ses armées. et finirent par se rendre maîtres du gouvernement de la Judée. Dans un besoin d’argent, Antiochus rassembla une armée pour aller piller le temple de la déesse d’Élymaïs, dans la Média, qui était célèbre par ses richesses ; et il fut repoussé par les habitants du pays. Il tomba malade en revenant à Tabes, dans la Perse, et mourut l’an 164 avant J.-C., dans des accès de frénésie que les Persans attribuèrent a son entreprise contre le temple d’Elymaïs, et les Juifs à la profanation de celui de Jérusalem. Antiochus n’était pas dépourvu de qualités ; il était généreux, aimait les arts, et montra beaucoup de valeur et d’habileté dans les guerres qu’il eut à soutenir ; mais ses défauts et ses folies ternirent beaucoup sa gloire. Il laissa deux fils, Antiochus et Alexandre, et une fille, nommée Laodice. C-r.


ANTIOCHUS V, surnommé Euraroa, fils du précédent, monta sur le trône, l’an 164 avant J.-C., âgé de neuf ans. Les Romains lui donnèrent Lysias pour tuteur, contre la volonté de son père, qui avait chargé de cet emploi Philippe, son ami. Il fut tué dans la troisième année de son règne. (Voy. Démétrius Soter et Lysias.) C-r.


ANTIOCHUS VI, surnommé Dionysis ou Bacchus, était fils d’Alexandre Balas. Démétrius Philadelphe s’étant fait détester de ses sujets par ses rapines, Tryphon amena de l’Arabie Antiochus, encore enfant, et le fit reconnaître roi, vers l’an 144 avant J.-C. Quelques victoires furent remportées sur les généraux de Démétrius ; mais bientôt Tryphon, las de gouverner sous le nom d’un autre, se débarrassa de ce jeune prince, en lui persuadant qu’il avait la pierre, et en lui faisant faire l’opération par des chirurgiens gagnés, qui le firent périr. Antiochus n’avait régné que 2 ans. C-r.


ANTIOCHUS VII, surnommé Évergètes ou Sidètes, fils de Démétrius Soter, demeurait à Rhodes, lorsqu’il apprit que Démétrius, son frère, avait été fait prisonnier par les Parthes. Il se rendit sur-le-champ à Antioche, et ayant épousé Cléopâtre, femme de Démétrius, il fut reconnu roi l’an 140 avant J.-C. il alla d’abord attaquer l’usurpateur Tryphon, qu’il vainquit et fit prisonnier. Il fit ensuite la guerre aux Juifs, qui avaient depuis longtemps secoué le joug des rois de Syrie, et assiégea Jérusalem avec tant de vigueur, que le grand prêtre, Jean Hircan, se trouva heureux d’acheter la paix en payant un tribut, Antiochus, ayant ainsi établi l’ordre dans ses États, rassembla une armée considérable pour aller attaquer les Parthes et les forcer à relâcher Démétrius. Il les défit dans trois combats, et Phraates, qui était alors leur roi, prit le parti de renvoyer Démétrius avec un corps de troupes pour le mettre en état de disputer le trône à son frère. Peu de temps après, Antiochus fut oblige de disperser les quartiers d’hiver de son armée, à cause du grand nombre de valets, de marchands, et d’autres bouches inutiles dont elle était suivie ; les Parthes en profitèrent, et firent égorger par les habitants les corps les plus éloignés. Antiochus voulut marcher à leur secours ; mais il fut défait, et se retira dans la haute Asie, où il se défendit quelque temps. Sur ces entrefaites, Cléopâtre l’ayant abandonné pour retourner à son premier époux, il forma le projet insensé d’épouser la déesse d’Élymaïs, dont il convoitait les immenses richesses. Les prêtres n’eurent pas l’air de s’y opposer ; mais lorsqu’il fut entré dans le temple pour s’emparer des trésors, à titre de dot, ils ouvrirent une porte secrète et l’accablèrent à coups de pierres, ainsi que ceux qui étaient avec lui, l’an 127 avant J.-C. C-r.


ANTIOCHUS VIII, surnommé Epihanes et Grypus, (nez crochu), et ANTIOCHUS IX, surnommé Philopator, ou Cyzicénus, étaient tous les deux fils de Cléopâtre, et avaient pour pères, le premier, Démétrius Nicanor, et le second, Antiochus Sidétes. Cléopâtre ayant fait mourir Seleucus son fils aîné, vers l’an 125 avant J.-C., plaça sur le trône Grypus, qu’elle espérait gouverner. Ce prince se dirigea effectivement quelque temps par ses conseils : il épousa Tryphæné, fille de Ptolémée Physcon, vainquit Alexandre Zabinas, le fit mourir, et voulut ensuite régner par lui-même. Cléo-