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Cellini. Fils d’un charbonnier ; mais, ajoute-t-il malignement, Bandinelli eut l’honneur d’être le premier de sa race, et d’anoblir sa postérité. Dans son enfance, et pendant un hiver rigoureux, il tomba à Florence une grande quantité de neige ; le jeune Baccio eut l’idée de s’en servir pour modeler une figure gigantesque, et y réussit avec le secours d’autres enfants et au grand étonnement des artistes de la ville, qui prédirent qu’il deviendrait un homme extraordinaire. Cet horoscope développa en effet les dispositions de Bandinelli, mais contribua peut-être à lui donner un caractère vain et envieux ; il conserva aussi toujours un goût décidé pour le colossal, et exécuta par la suite plusieurs figures de ce genre. Baccio avait appris de son père les premiers éléments du dessin ; et, pour se perfectionner, il entra chez François Rustici, l’un des meilleurs sculpteurs de ce temps-la. Sur ces entrefaites, le fameux carton que Michel-Ange avait fait en concurrence avec Léonard de Vinci, ayant été offert à l’admiration du public, devint l’objet de l’étude de tous les jeunes artistes ; Baccio fut un de ceux qui en profitèrent le mieux ; mais lors de la révolution qui éclata à Florence en 1512, ce chef-d’œuvre de l’art ayant été mis en pièces, on accusa Bandinelli de cette coupable action. Quoi qu’il en soit, l’envie et la haine qu’il avait vouées à Michel-Ange et qu’il ne dissimulait pas, durèrent autant que sa vie. Sans cesse tourmenté du désir d’égaler et même de surpasser dans tous les genres ce célèbre artiste, Bandinelli voulut apprendre à peindre ; il essaya à plusieurs reprises ; mais, soit faute d’adresse, soit manque d’intelligence et de dispositions pour cet art, il échoua complètement, quoiqu’il fût grand dessinateur. Il tourna alors toute son ambition vers la sculpture, et exécuta un Mercure, qui fut envoyé à François Ier. Il fit ensuite le St. Pierre qu’on voit dans la cathédrale de Florence, et l’Orphée du palais Pitti. Il chercha dans cet ouvrage à imiter la nature de l’Apollon du Belvéder, et y réussit assez bien : cette statue fut posée sur une base sculptée avec délicatesse par Benedetto da Rovezzano. François Ier avant demandé au pape une copie du Laocoon, Bandinelli en fut chargé, et se vanta de surpasser l’original, C’était à cette occasion que Michel-Ange disait ; « Celui qui marche sur les traces d’un autre et reste toujours en arrière. » Cette copie du Laocoon resta à Florence ; elle est encore dans la galerie ; mais on ne peut plus guère juger de son mérite, parce qu’elle a été brisée et presque calcinée en 1762, dans l’incendie qui dévora une partie de ce musée. Le plus important des nombreux travaux de Bandinelli est le groupe colossal d’Hercule terrassant Cacus, qu’on voit à Florence, sur la place du Palais vieux. Cet ouvrage a été l’objet de la critique des contemporains de Bandinelli ; l’on ne cessait d’appliquer sur la base des inscriptions satiriques et injurieuses, au point que, pour faire cesser le scandale, l’on fut obligé de mettre en prison quelques mauvais plaisants. L’auteur profita néanmoins des critiques, et retoucha ses figures : elles ont du grandiose dans le dessin, mais l’action est froide, les attitudes roides et gênées, et les muscles sont trop ressentis : ce qui fit comparer le torse de l’Hercule à un sac rempli de pommes de pin. L’attache du col de la figure de Cacus est admirable ; cette partie fut moulée en plâtre, et on l’envoya à Rome, à Michel-Ange, qui se contenta de répondre « qu’elle était fort belle, mais qu’il fallait Voir le reste. » Bandinelli entendait bien la composition des bas-reliefs ; il en exécuta un très-beau, qu’il fit couler en bronze, et dont il fit présent à Charles-Quint : cet empereur récompensa l’artiste orgueilleux de la manière la plus flatteuse, en le nommant chevalier de St-Jacques. On voit dans la cathédrale de Florence, autour du chœur, d’autres bas-reliefs du même auteur ; ils sont d’un beau style, et ont été gravés par Morghen. On connaît quelques compositions dessinées par Bandinelli, telles que le Martyre de St. Laurent et le Massacre des Innocents, qui ont été gravées par Marc-Antoine, Marc de Ravenne et Augustin le Vénitien. Son dernier Ouvrage de sculpture est une figure du Christ mort, soutenu par Nicodème, dans lequel on reconnaît la tête de l’auteur exécutée par Clément, son fils, qui annonçait beaucoup de talent, mais dont la mort fut prématurée. Ayant obtenu la permission de placer ce groupe dans une chapelle de l’église de’ Servi, et sur le tombeau dans lequel il désirait être déposé, ainsi que son épouse, Bandinelli voulut aussi y transporter lui-même les ossements de son père : après ce transport, qu’il exécuta de ses propres mains, et un travail forcé, il tomba malade de fatigue, et mourut au bout de quelques jours à l’âge de 72 ans, laissant plusieurs enfants, qui héritèrent de ses grandes richesses et d’une foule de dessins, de modèles et de marbres ébauchés. Baccio Bantlinelli fut mieux apprécié après sa mort que de son vivant. Il avait un style élevé et grandiose, mais ses figures manquent de mouvement, de souplesse et de grâce. Ses compositions dessinées sont compliquées et se recommandent par des expressions fortes ; on y remarque plus de savoir que de goût. Enfin, malgré sa haine contre Michel-Ange, il semble e s’être élevé qu’en s’appuyant sur lui. La dureté de son caractère obscurcissait ses bonnes qualités ; il disait sans cesse du mal des ouvrages des autres artistes ; il aimait les procès, et eut des altercations fort vives dans lesquelles l’autorité fut obligée d’intervenir. Très-vain de sa noblesse récente, il changea plusieurs fois de nom pour faire oublier son origine, et s’en tint à la fin à celui de Bandinelli, parce qu’il prétendait que ses ancêtres étaient de la famille des Bandinelli de Sienne. C-N.


BANDINI (Ange-Marie), célèbre littérateur italien du 18e siècle, naquit à Florence, le 25 septembre 1726. Resté orphelin dans son enfance, il eut pour appui et pour premier guide son frère Joseph Bandini, jurisconsulte estimé. Ange-Marie fit ses études sous les jésuites. Il annonça de bonne heure une sorte de passion pour les manuscrits, les livres rares et la recherche des inscriptions inédites ; il montra aussi du goût Pour la poésie ; mais il y renonça pour une cause qui fait voir que ce goût n’était pas en lui une passion bien forte. Il composa pour le