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l’irruption des glaces flottantes qu’une cause inconnue détache des pôles. Les roches pelées et tranchantes, les geisers ou jets d’eau bouillante et les sources thermales ou tièdes (Avercr et Laugar), au milieu des images les plus attristantes de la nature polaire ; les amas de basalte qui forment, comme dans le comté d’Autrim, d’immenses piliers naturels, les collines de soufre au pied desquelles on voit l’argile dans une ébullition continuelle, et dans les tlancs desquelles sans cesse bouillonnent et sil !llent les eaux ; la végétation rabougrie et maigre qui a succédé aux grandes forêts dont jadis, a ce que l’on assure, étaient couvertes les rives méridionales ; les énormes quantités de gros troncs de sapins et autres arbres qui viennent chaque année se jeter sur les côtes septentrionales de l’île, principalement au Cap-Nord et à la pointe dite Langaness ; enfin, les nombreuses espèces on variétés zoologiques qui peuplent l’air, la terre et les eaux dans cette île si peu connue, tout fut pour Banks et sa suite l’objet d’un examen attentif et fécond en résultats. L’ichtyologie et l’entomologie d’une part, de l’autre la partie de la botanique relative aux acotylédenes, durent spécialement à ce voyage des accroissements inappréciables.— Les observations de Banks ne portèrent pas simplement sur l’histoire naturelle. Les mtrnrs, la langue, la religion, la littérature, l’état social des peuples, attirèrent aussi son attention ; et l’lE`.urope lui doit quelques notions aujourd’hui populaires sur l’ancienne culture intellectuelle des lslantlais, sur leurs rapports avec le culte odinique dont les lt°í.Ct !$ subsistent encore chez eux, sur la langue (les Eddas dont ils parlent un dialecte fort peu éloigné de l’idiome primitif. Il lit plus ; et, tant par suite de son voyage que par des relations directes avec d’illustres Danois, il fixa les regards du gouvernement de Copenhague sur cette possession trop négligec ; et dans la suite, attentif à donner lui-même aux habitants des marques effectives de souvenir, deux fois les sachant en proie aux famines, si fréquentes alors dans un pays aussi infertile qu’isolé, il leur expédie des cargaisons de grains al ses frais. L’expédition d’lslande lut la dernière de ce genre à laquelle se livra Banks. À partir de cette époque, il ne s’occupa plus que de la coordination des matériaux qu’il avait rassemblés. À côté de sa bibliothèque, depuis longtemps commencée et des lors extrêmement importante par le nombre, le choix et la spécialité des ouvrages, grandirent des collections qui, par leur magnificence vraiment royale, l’emportaient de beaucoup sur celles qui attirent les amis de l’étude dans la plupart des établissements publics. On s’attendait a voir Banks mettre au jour le fruit de ses recherches si variées ; et probablement tel fut dans l’origine son projet. On avait même commencé a exécuter des gravures qui devaient être ’portées à 2,000. Mais, soit que des le principe le travail eut été mal distribué entre ceux qui auraient pu coopérer à cette belle publication, soit que dans les commencements les affaires politiques rendissent les circonstances difficiles pour la librairie, et qu’ensuite la mort du docteur Solander, survenue en 1782, eût fait ajourner indéfiniment un ouvrage dont il eût nécessairement été le collaborateur principal, soit enfin que des soins de patronage et les petites intrigues auxquelles donna lieu l’élévation de Banks à la place de président de la société royale de Londres aient absorbé le temps qu’il eût pu consacrer pour sa part à cette entreprise, les préparatifs n’amenèrent aucun résultat ; et, au grand déplaisir des naturalistes, rien ne parut de ce qu’ils s’attendaient à voir. Il faut ajouter que cette inaction ne tint ni a l’oisiveté (trop de preuves d’act.ivité en tout genre ont été données par Banks pour que l’on s’arréte à ce soupçon), ni, ce qui pourrait sembler plus plausible, au désir de garder pour lui le secret de ses découverteslîn des traits essentiels de son caractère est la générosité avec laquelle ’il mit toujours au service de quiconque voulait se livrer aux travaux scientifiques, ses collections, ses dessins et ses livres. Il céda ses vues de Staffa, les premières de toutes, à Tb. Pennant, qui avait en vain tenté d’aborder a la grotte mélodieuse ou grotte de Fingal (An Guc- Vine), tel est le nom de la grotte aux colonnes prismatiques de basalte, et qui en enrichit la relation de son voyage en Écosse. Gaertner a librement et des milliers de fois consulté ses berbiers pom* composer son admirable traité de Fructíbu : et Seminílnu planitamm. Les Eclogœ ameríeanœ de Valtl doivent une partie de leur mérite aux facilités non moins grandes qu’il ne cessa d’accorder à l’auteur. L’ouvrage de Bob. Brown sur les plantes de la Nouvelle-Hollande a de même été rédigé au milieu des collections de Banks ; et on le sent assez a l’extrême netteté des descriptions. Fabricius a disposé de tous ses insœtes ; Broussonnet, en commençantson ichtyologie, reçut de lui, à titre de don, des échantillons de totl8 ses poissons. Qu’on ajoute a tout cela que sa maison était le rendez-vous perpétuel des naturalistes et des savants de toutes les nations, et l’on comprendra que ce n’est pas au désir de monopoliser ses trésors scientifiques qu’est du le silence de Banks. En effet, qu’exigeait l’intérêt des sciences ’I Que ces immenses richesses fussent mises en œuvre ; il n’exigeait pas qu’elles le fussent par lui-même. Il y a plus, il était à souhaiter que d’autres mains exploitassent cette mine opulente ; car de cette manière chacun empruntait a la collection de Banks les objets de nature à entrer dans lecadre spécial de ses études ; de cette manière ils couraient moins de risque d’étre décrits deux fois, trois fois, ou même davantage, tandis que certes la publication d’un Thesaurus Banksiamts ou Gaxophylaeium Banluianum, comprenant a la fois des objets géologiques, minéralogiques, botaniques, zoologiques, de toutes les classes, de tous les ordres, de toutes les familles, eût nécessairement amené cet inconvénient, et imposé d’avance à tout naturaliste la loi de répartir ensuite chacun des objets admis aux honneurs du Gazopltylacium dans sa famille, dans son ordre, dans sa classe. — Pendant que Banks se recommandait ainsi a l’estime de l’Europe savante par la protection éclairée qu’il accordait à ses frères en histoire naturelle, la présidence de la société royale de Londres vint à vauuer par la de5