Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/264

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Péra a sur le penchant occidental de sa colline, un autre cimetière qu’on appelle le Petit Champ des Morts. Il est traversé par plusieurs chemins, qui conduisent à différens quartiers ; il est partout planté de cyprès et couvert de pierres sépulcrales, avec leurs inscriptions écrites quelquefois en lettres d’or. Les Francs qui habitent Péra viennent s’y promener ; j’y vais presque tous les jours respirer la fraicheur du soir et contempler le beau spectacle du soleil couchant.

J’ai fait plusieurs promenades à Scutari ; c’est là que le trépas étale toutes ses solennités ; c’est là qu’est la grande métropole des morts : l’Orient n’a point de cimetière aussi magnifique, aussi vaste, aussi renommé. Comment vous peindre cette campagne immense couverte de tombes et de cyprès ; comment vous décrire ces larges routes bordées d e marbres et de verdure, qui ressemblent aux chemins de nos forêts royales et surpassent la splendeur des parcs et des jardins réservés aux puissants monarques ? Ces routes solitaires se croisent comme dans un labyrinthe, toutes mènent à des sépulcres ; au milieu de cette magnificence lugubre, tout est immobile, tout est muet ; les zéphirs ne murmurent point, les oiseaux point de chant. Ici vous voyez des enceintes ornées de fleurs et d’arbustes, où parfois une épouse, une mère en deuil, apparaissent comme de pâles ombres ; plus loin des mausolées que per-