Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/392

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uns sont des proscrits de la politique, les autres ont quitté leur pays pour être dispensés de payer leurs dettes, d’autres ont traversé les mers pour courir les aventures ; ils vont de rivage en rivage, de royaume en royaume ; toutes les conditions, tous les moyens d’existence leur sont indifférens ; leur patrie est partout où ils trouvent un asile et du pain ; aujourd’hui à Péra, ils seront demain sur le chemin de Trébisonde, de Smyrne, d’Alep ou de Bagdad. Ces aventuriers ont des pièges pour tout le monde ; beaucoup d’entre eux ont fait de l’art du mensonge l’étude de toute leur vie, et par je ne sais quelle fascination ils s’emparent de vous comme ces animaux impurs qui ont le pouvoir d’attirer avec leur souffle les oiseaux du ciel. Je voudrais placer aussi dans la classe des aventuriers cette foule de médecins qui n’ont jamais étudié la médecine et qui vivent de l’ignorance des Turcs ; il part chaque matin de Péra une bande d’esculapes qui, portant leur pharmacie dans un mouchoir, s’en vont parcourir les différens quartiers de Stamboul ; ils sont ordinairement suivis d’un Juif ou d’un Grec qui leur sert d’interprète ; ces sortes d’aventuriers ne sont pas les moins dangereux, car ils en veulent non-seulement à votre bourse mais encore à votre vie, et je prie Dieu qu’il nous en défende.

On voit d’après ce tableau que tous les ridicules et tous les vices de l’Occident se trouvent à Péra ;