Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/312

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le cortège funèbre passait, on entendait des détonations, c’était fini pour cette nuit-là.

Un matin, on m’appelle, nous nous serrons la main croyant ne plus nous revoir ; je n’allai pas loin, seulement jusqu’à un cabinet, sur le carré de la porte. Un homme y était assis, devant une petite table, il commença à m’interroger :

— Où étiez-vous le 14 août ? me demanda-t-il.

Méchamment, je me fis expliquer ce qui avait eu lieu le 14 août, après quoi je lui dis : — Ah ! l’affaire de la Villette ! j’étais devant la caserne des pompiers.

Il écrivait jusque-là, assez poli, je lui répondais de mon côté avec une grande douceur, m’amusant comme une écolière qui peut faire une bonne malice.

— Et à l’enterrement de Victor Noir, vous y étiez ? me dit-il.

Ses joues commençaient à se colorer.

— Oui, répondis-je.

— Et le 31 octobre, et le 22 janvier ? devant l’Hôtel-de-Ville.

— Qu’avez-vous fait pendant la Commune ?

— J’étais aux compagnies de marche.

Il avait de plus en plus rougi de colère, alors écrasant sa plume sur le papier, il dit :

— Cette femme à Versailles !

Toutes furent interrogées, et les unes ayant servi la Commune, les autres étant femmes de fusillés, on nous envoya à Versailles.

Notre file comprenait encore une ou deux de ces figurantes, que nous avions rencontrées à Satory et qui là encore étaient ensemble, mais se tenant mieux. On avait besoin, m’avait dit celui qui interrogeait, de faire voir au grand jour les crimes de la Commune !

C’est pourquoi nous devions, à la prison des Chantiers, retrouver certain membre de ces malheureuses.

Sur le chemin de Satory à Versailles, une femme en