Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/361

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mêlent aux nuages. D’un côté, à droite, des navires qui entrent dans le port, une forteresse assise. Sur la hauteur d’un des côtés de notre cage, on voyait par les sabords, il y avait aussi l’heure de promenade sur le pont où l’on voyait mieux encore.

La haute mer du Cap fut pour moi un ravissement.

Je n’avais jamais vu avant la Commune, que Chaumont et Paris, et les environs de Paris avec les compagnies de marche de la Commune, puis quelques villes de France, entrevues des prisons et j’étais maintenant, moi qui toute ma vie avais rêvé les voyages, en plein océan, entre le ciel et l’eau, comme entre deux déserts où l’on n’entendait que les vagues et le vent.

Nous vîmes la mer polaire du Sud où, dans une nuit profonde, la neige tombait sur le pont.

Comme de partout il m’en resta quelques strophes.


dans les mers polaires


La neige tombe, le flot roule,
L’air est glacé, le ciel est noir,
Le vaisseau craque sous la houle
Et le matin se mêle au soir.

Formant une ronde pesante,
Les marins dansent en chantant :
Comme un orgue à la voix tonnante,
Dans les voiles souffle le vent.

De peur que le froid ne les gagne,
Ils disent au pôle glacé
Un air des landes de Bretagne,
Un vieux bardit du temps passé.

Et le bruit du vent dans les voiles,
Cet air si naïf et si vieux,
La neige, le ciel sans étoiles,
De larmes emplissent les yeux.