Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/379

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tait les chiourmes dans une telle rage qu’ils déchirèrent des rideaux bien innocents de tout cela, en allant reconnaître s’ils ne trouveraient à la case des évadés rien qui les mit sur la trace.

Personne n’avait vu les fugitifs depuis le jeudi ; on était au samedi, ils étaient sauvés.

Le cantinier Duserre dont la barque avait été employée par Granthille pour venir au devant des évadés de la presqu’île, eut quinze jours de cachot, la malheureuse barque quoique plongée à l’aide de grosses pierres dans la mer, s’étant tout à coup retournée par l’effort des flots et s’étant remise à flotter, ce qui avait paru démontrer la complicité de Duserre.

Tout est bien qui finit bien : la barque non seulement fut payée, mais le brave homme obligé de partir pour Sydney, y devint plus à son aise qu’il n’eût pu l’être à Nouméa où le commerce est peu de chose, à part la traite des naturels sous forme d’engagements.

Quelques pages de mes Mémoires, chez Roy éditeur, rue Saint-Antoine, contiennent des lettres racontant la conduite du gouvernement colonial de Calédonie, à l’occasion de l’évasion de Rochefort.

Après l’évasion de Rochefort, MM. Aleyron et Ribourt envoyés pour terrifier la déportation, probablement afin d’y faire revenir Rochefort, eurent le ridicule d’envoyer pendant un certain temps sur les hauteurs autour de Numbo des factionnaires qui avaient l’air de jouer la Tour de Nesle avec décors grandioses.

On entendait à intervalles réguliers au sommet des montagnes : sentinelle, garde à vous ! et par les nuits claires les silhouettes noires des factionnaires se dessinaient sur les cimes dans le clair de lune intense.

Quelques-uns de ces factionnaires avaient de belles voix : c’était charmant. On sortait sur les portes des cases pour les entendre et les voir.

Puis les voix s’enrouèrent ; on était blasé sur les