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28 mars 1918.

La brutale violence de mon mari s’aggrave. Récemment, il présidait un Conseil d’administration qui dut examiner une demande de relèvement de salaires, justifiée par la cherté de la vie. Avec une inconscience féroce, sur un ton bassement comique, il s’est écrié !

— La cherté de la vie ? Qué qu’c’est qu’ça ?

Hier, il exigeait, devant moi, trois ans, cinq ans de lutte. « Gagner la guerre… vaincre ». Toujours sans préciser l’enjeu, ni définir la victoire. Le député Lancerot lui représenta les dépenses effroyables, l’abîme creusé, l’avenir compromis. Il l’interrompit :

— La situation financière ? Ça n’existe plus. Toute l’Europe est en faillite. Donc, autant continuer.

— Et les hommes ? ai-je dit.

— Les hommes ? Je m’en fous.

L’angoisse de l’offensive ne suffit pas à expliquer sa fureur. Il a d’autres déboires. Sa maîtresse, Colette Foucard, s’entoure au plus près