Page:Michel Corday - Les Hauts Fourneaux, 1922.djvu/109

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veaux fours, les armées lui en ont envoyé cinq. À l’entendre, le militaire professionnel brime et méprise le civil : un fossé se creuse entre l’État-Major et le reste du pays.

Ses plaintes ne sont point isolées ni nouvelles. Souvent me sont parvenus les échos de ces doléances. Un très important sénateur racontait que, téléphonant à un général sur un ton sans doute insuffisamment respectueux, son interlocuteur l’avait enjoint « d’observer au téléphone une attitude réglementaire ». Pendant l’offensive d’Artois, le ministre de l’Intérieur voulut soulever un incident, parce que ses propres préfets de la zone des armées s’étaient vu interdire, militairement, de lui téléphoner. Un député, animé pourtant d’un zèle belliqueux, maudit à tous les vents les Bureaux et les États-Majors « qui ne veulent pas se croire en guerre, qui ont l’éternité devant eux. » Il dénonce leur lenteur, leur jalousie de toute initiative, de toute découverte qui ne sort pas de leur sein, « leur insuffisance violence et leur conservatisme agressif. » Et, jusqu’à la fin de l’an dernier, le gouvernement ne se plaignait-il pas d’ignorer le nombre des soldats aux armées ? Ne lui fut-il pas incidemment révélé par le nombre de rations à fournir et de bouteilles de Champagne