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en particulier sur les bras, dans un moment délicat, l’affaire d’Orient. Ils disent : « C’est la boulette empoisonnée. »

4 décembre 1915.

J’achevais de parcourir les Journaux du soir quand Colette Foucard est entrée, fraîche, tranquille et fleurant bon dans ses fourrures. Mon mari ne doit pas être loin. Elle me demande, d’une voix distraite :

— Rien de nouveau ?

Une idée saugrenue me traverse : — Si. Une catastrophe épouvantable. Mille morts… autant de blessés.

La voilà tout effarée :

— Ou ça ?

— Sur le front.

Déjà, elle a repris sa sérénité :

— Ah ! vous m’avez fait peur…

Et c’est vrai que, pour elle et ses pareilles, ça ne compte pas, ça n’existe pas, ces mille morts quotidiens !… Et penser qu’en temps de paix, lorsqu’un puisatier était enseveli sous un éboulement, tout le pays pantelait, dans l’an-