Page:Michelet - Œuvres complètes Vico.djvu/594

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semblait diminuer la majesté impériale, ils introduisirent le mot de puissance paternelle, patria potestas[1].

En dernier lieu, la bienveillance des empereurs s’étendant à toute l’humanité, ils commencèrent à favoriser les esclaves. Ils réprimèrent la cruauté des maîtres. Ils étendirent les effets de l’affranchissement, en même temps qu’ils en diminuaient les formalités. Le droit de cité ne s’était donné dans les temps anciens qu’à d’illustres étrangers qui avaient bien mérité du peuple romain ; ils l’accordèrent à quiconque était né à Rome d’un père esclave, mais d’une mère libre, ne le fût-elle que par affranchissement. La loi reconnaissait libre quiconque naissait dans la cité ; sous de telles circonstances, le droit naturel changea de dénomination ; dans les aristocraties, il était appelé droit des gens, dans le sens du latin gentes, maisons nobles [pour lesquelles ce droit était une sorte de propriété] ;

  1. En cela l’habileté d’Auguste leur avait donné l’exemple. De crainte d’éveiller la jalousie du peuple en lui enlevant le privilège nominal de l’empire, imperium, il prit le titre de la puissance tribunitienne, potestas tribunitia, se déclarant ainsi le protecteur de la liberté romaine.
      Le tribunat avait été simplement une puissance de fait ; les tribuns n’eurent jamais dans la république ce qu’on appelait imperium. Sous le même Auguste, un tribun du peuple ayant ordonné à Labéon de comparaître devant lui, ce jurisconsulte célèbre, le chef d’une des deux écoles de la jurisprudence romaine, refusa d’obéir ; et il était dans son droit, puisque les tribuns n’avaient point l’imperium.
      Une observation a échappé aux grammairiens, aux politiques et aux jurisconsultes, c’est que dans la lutte des plébéiens contre les patriciens pour obtenir le consulat, ces derniers, voulant satisfaire le peuple sans établir de précédents relativement au partage de l’empire, créèrent des tribuns militaires en partie plébéiens, cum consulari potestate, et non point cum imperio consulari. Aussi tout le système de la république romaine fut compris dans cette triple formule : Senatus auctoritas, populi imperium, plebis potestas. Imperium s’entend des grandes magistratures, du consulat, de la préture, qui donnaient le droit de condamner à mort ; potestas, des magistratures inférieures, telles que l’édilité, et modica coercitione continetur. (Vico.)