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LA GAULE SOUS L’EMPIRE. DÉCADENCE DE L’EMPIRE.

bien être curiale à leur place. La loi ne les ménage pas : « Certains hommes lâches et paresseux désertent les devoirs de citoyens, etc., nous ne les libérerons qu’autant qu’ils mépriseront leur patrimoine. Convient-il que des esprits occupés de la contemplation divine conservent de l’attachement pour leurs biens ?… »

L’infortuné curiale n’a pas même l’espoir d’échapper par la mort à la servitude. La loi poursuit même ses fils. Sa charge est héréditaire. La loi exige qu’il se marie, qu’il lui engendre et lui élève des victimes. Les âmes tombèrent alors de découragement. Une inertie mortelle se répandit dans tout le corps social. Le peuple se coucha par terre de lassitude et de désespoir, comme la bête de somme se couche sous les coups et refuse de se relever. En vain les empereurs essayèrent, par des offres d’immunités, d’exemptions, de rappeler le cultivateur sur son champ abandonné[1]. Rien n’y fit Le désert s’étendit chaque jour. Au commencement du ve siècle, il y avait dans l’heureuse Campanie, la meilleure province de tout l’Empire, cinq cent vingt-huit mille arpents en friche.

  1. Constantin., in Cod. Justin., l. XI, t. Lviii, lex 1. Prædia deserta decurionibus loci sui subsunt assignari debent, cum immunitate triennii.

    « Honorii indulgentia Campaniæ tributa, aliquot jugerum velut desertorum et squalidorum… Quingena viginti octo millia quadraginta duo ingera, quæ Campania provincia, juxta inspectorum relationem et veterum monumenta chartarum, in desertis et squalidis locis habere dignoscitur, iisdem provincialibus concessimus, et chartas superfluæ descriptionis cremari censemus. » Arc. et Hon., in Cod. Theod., lib. XI, tit. xxviii, l. II.