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HISTOIRE DE FRANCE.

villes. Ces théâtres, ces cirques, ces aqueducs, ces voies que nous admirons encore, sont le durable symbole de la civilisation fondée par les Romains, la justification de leur conquête de la Gaule. Telle est la force de cette organisation, qu’alors même que la vie paraîtra s’en éloigner, alors que les barbares sembleront près de la détruire, ils la subiront malgré eux. Il leur faudra, bon gré, mal gré, habiter sous ces voûtes invincibles qu’ils ne peuvent ébranler ; ils courberont la tête, et recevront encore, tout vainqueurs qu’ils sont, la loi de Rome vaincue. Ce grand nom d’Empire, cette idée de l’égalité sous un monarque, si opposée au principe aristocratique de la Germanie, Rome l’a déposée sur cette terre. Les rois barbares vont en faire leur profit. Cultivée par l’Église, accueillie dans la tradition populaire, elle fera son chemin par Charlemagne et par saint Louis. Elle nous amènera peu à peu à l’anéantissement de l’aristocratie, à l’égalité, à l’équité des temps modernes.

Voilà pour l’ordre civil. Mais à côté de cet ordre un autre s’est établi, qui doit le recueillir et le sauver pendant la tempête de l’invasion barbare. Le titre romain de defensor civitatis va partout passer aux évêques. Dans la division des diocèses ecclésiastiques subsiste celle des diocèses impériaux. L’universalité impériale est détruite, mais l’universalité catholique apparaît. La primatie de Rome commence à poindre confuse et obscure[1]. Le monde du moyen âge se

  1. Au commencement du cinquième siècle, Innocent Ier avance quelques timides prétentions, invoquant la coutume et les déci-