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HISTOIRE DE FRANCE.

Chilpdric dans Tournay, il se croyait roi de Neustrie, et déjà se faisait élever sur le pavois, lorsque deux hommes de Frédégonde, armés de couteaux empoisonnés, sortent de la foule et le poignardent (575). Ses ministres goths furent à l’instant massacrés par le peuple. Brunehaut, de victorieuse, de toute-puissante qu’elle était, devint captive de Chilpéric et de Frédégonde, qui lui laissèrent pourtant la vie[1]. Elle trouva ensuite le moyen d’échapper, grâce à l’amour qu’elle avait inspiré à Mérovée, fils de Chilpéric. Le malheureux fut aveuglé par sa passion au point d’épouser Brunehaut ; c’était épouser la mort. Son père le fit tuer. L’évêque de Rouen, Prétextât, homme imprudent et léger qui avait eu l’audace de les marier, fut protégé d’abord par les scrupules de Chilpéric ; plus tard Frédégonde s’en débarrassa.

Brunehaut entra dans l’Ostrasie, où son fils enfant, Childebert II, régnait nominalement. Mais les grands ne voulurent plus obéir à l’influence gothique et romaine. Ils étaient même sur le point de tuer le Romain Lupus, duc de Champagne, le seul d’entre eux qui fût dévoué à Brunehaut. Elle se jeta au milieu des bataillons armés, et lui donna ainsi le temps d’échapper. Les grands d’Ostrasie, sentant leur supériorité sur la Gaule romaine de Bourgogne, où régnait Gontran, voulaient descendre avec leurs troupes barbares dans le Midi, et promettaient part à Chilpéric. Plusieurs des grands de la Bourgogne les appelaient. Chilpéric y donnait la

  1. Chilpéric vint à Paris prendre les trésors de Brunehaut, et la relégua elle-même à Rouen, et ses filles à Meaux.