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HISTOIRE DE FRANCE.

laient dormir avec les femmes des Slaves. Leur camp, ou ring, était un prodigieux village de bois qui couvrait toute une province, fermé de haies d’arbres entrelacées ; il y avait là les rapines de plusieurs siècles, les dépouilles des Byzantins, entassement étrange des objets les plus brillants, les plus inutiles aux barbares, bizarre musée de brigandage. Ce camp, d’après un vieux soldat de Charlemagne, aurait eu douze ou quinze lieues de tour[1], comme les villes de l’Orient, Ninive ou Babylone : tel est le génie des Tartares. Le peuple uni en un seul camp, le reste en pâturages déserts. Celui qui visita le chagan des Turcs au vie siècle, trouva le barbare qui siégeait sur un trône d’or au milieu du désert. Celui des Avares, dans son village de bois, se faisait donner des lits d’or massif par l’empereur de Constantinople.

Ces barbares, devenus voisins des Francs, auraient levé des tributs sur eux comme sur les Grecs. Charlemagne les attaqua avec trois armées, et s’avança jusqu’au Raab, brûlant le peu d’habitations qu’il rencon-

  1. Monach. S. Galli, l. II, c. ii. « Terra Huorum novem circulis cingebatur… Tam latus fuit unus circulus… quantum est spatium de castro Turonico ad Constantiam… Ita vici et villæ erant locatæ, ut de aliis ad alias vox humana posset audiri. Contra eadem quoque ædificia, inter inexpugnabiles illos muros, portæ non satis latæ erant constitutæ… Item de secundo circulo, qui similiter ut primus erat exstructus ; vigenti milliaria Teutonica quæ sunt quadraginta Italica, ad tertium usque tendebantur ; similiter usque ad nonum ; quamvis ipsi circuli alius alio mùlto contractiores fuerunt… Ad has ergo munitiones per ducentos et eo amplius annos, qualescumque omnium occidentialum divitias congregantes.. orbem occiduum pene vacuum dimiserunt. »