Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
274
HISTOIRE DE FRANCE

à vivre des aumônes du peuple. C’est peut-être alors qu’il bâtit l’église dont on lui attribue la construction. L’architecture était un des arts dont la tradition se perpétuait parmi les chefs de l’ordre ecclésiastique. Nous voyons un peu après, dans la croisade des Albigeois, maître Théodise, archidiacre de Notre-Dame de Paris, réunir, comme Becket, les titres de légiste et d’architecte[1].

Cependant le roi d’Angleterre, pour porter le dernier coup au primat, essaya de transporter à l’archevêque d’York les droits de Kenterbury, et lui fit sacrer son fils. Au banquet du couronnement, il voulut, dans l’ivresse de sa joie, servir lui-même à table le jeune roi, et ne sachant plus ce qu’il faisait, il lui échappa de s’écrier que « depuis ce jour il n’était plus roi », parole fatale, qui ne tomba pas en vain dans l’oreille du jeune roi et des assistants.

Thomas, frappé par Henri de ce nouveau coup, abandonné et vendu par la cour de Rome, écrivait au pape, aux cardinaux, des lettres terribles, des paroles de condamnation : « Pourquoi mettez-vous dans ma route la pierre du scandale ? pourquoi fermez-vous ma voie d’épines ?… Comment dissimulez-vous l’injure que le Christ endure en moi, en vous-même, qui devez tenir ici-bas la place du Christ ? Le roi d’Angleterre a envahi les biens ecclésiastiques, renversé les libertés de l’Église, porté la main sur les oints du Seigneur, les

  1. Ce fut Lanfranc qui bâtit, sur l’ordre de Guillaume-le-Conquérant, l’église de Saint-Étienne de Caen, dernier et magnifique produit de l’architecture romane.