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HISTOIRE DE FRANCE

défendons de fermer la porte. Il ne convient pas de faire de l’église une bastille. » Puis il fit entrer ceux des siens qui étaient restés dehors.

A peine il avait le pied sur les marches de l’autel, que Renaud-fils-d’Ours parut à l’autre bout de l’église revêtu de sa cotte de mailles, tenant à la main sa large épée à deux tranchants, et criant : « A moi, à moi, loyaux servants du roi ! » Les autres conjurés le suivirent de près, armés comme lui de la tête aux pieds et brandissant leurs épées. Les gens qui étaient avec le primat voulurent alors fermer la grille du chœur ; lui-même le leur défendit et quitta l’autel pour les en empêcher ; ils le conjurèrent avec de grandes instances de se mettre en sûreté dans l’église souterraine ou de monter l’escalier par lequel, à travers beaucoup de détours, on arrivait au faîte de l’édifice. Ces deux conseils furent repoussés aussi positivement que les premiers. Pendant ce temps, les hommes armés s’avançaient. Une voix cria : « Où est le traître ? » Becket ne répondit rien. « Où est l’archevêque ? — Le voici, répondit Becket, mais il n’y a pas de traître ici ; que venez-vous faire dans la maison de Dieu avec un pareil vêtement ? Quel est votre dessein ? — Que tu meures. — Je m’y résigne ; vous ne me verrez point fuir devant vos épées ; mais au nom de Dieu tout-puissant je vous défends de toucher à aucun de mes compagnons, clerc ou laïque, grand ou petit. » Dans ce moment il reçut par derrière un coup de plat d’épée entre les épaules, et celui qui le lui porta lui dit : « Fuis, ou tu es mort. » Il ne fit pas un mouve-