Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/336

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
326
HISTOIRE DE FRANCE

d’un droit immense, d’une immense impuissance, toutes les rancunes de cette vieille guerre, Henri VI les apporta en naissant. C’est peut-être le seul empereur en qui on ne retrouve rien de la débonnaireté germanique. Il fut pour Naples et la Sicile, héritage de sa femme, un conquérant sanguinaire, un furieux tyran. Il mourut jeune, empoisonné par sa femme, ou consommé de ses propres violences. Son fils, pupille du pape Innocent III, fut un empereur tout italien, un Sicilien, ami des Arabes, le plus terrible ennemi de l’Église.

Le roi d’Angleterre n’était guère moins hostile au pape ; son ennemi et son vassal alternativement, comme un lion qui brise et subit sa chaîne. C’était justement alors le Cœur-de-Lion, l’Aquitain Richard, le vrai fils de sa mère Éléonore, celui dont les révoltes la vengeaient des infidélités d’Henri II. Richard et Jean son frère aimaient le Midi, le pays de leur mère : ils s’entendaient avec Toulouse, avec les ennemis de l’Église. Tout en promettant ou faisant la croisade, ils étaient liés avec les musulmans.

Le jeune Philippe, roi à quinze ans sous la tutelle du comte de Flandre (1180), et dirigé par un Clément de Metz son gouverneur, et maréchal du palais, épousa la fille du comte de Flandre, malgré sa mère et ses oncles, les princes de Champagne. Ce mariage rattachait les Capétiens à la race de Charlemagne, dont les comtes de Flandre étaient descendus[1]. Le comte de

  1. Beaudoin Bras-de-Fer avait enlevé, puis épousé Judith, fille de Charles-le-Chauve.