Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/208

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nouvelle, et rendant à celle-ci ce que l’étiquette ordonnait pour l’autre, il sortit à reculons, comme on faisait devant le roi[1].

La cour avait imaginé un autre moyen de renvoyer les Communes, moyen brutal employé jadis avec succès dans les États généraux, de faire simplement démeubler la salle, démolir L’amphithéâtre, l’estrade du roi. Des ouvriers entrent en effet ; mais sur un mot du président, ils s’arrêtent, déposent leurs outils, contemplent avec admiration la majesté calme de l’Assemblée, deviennent des auditeurs attentifs et respectueux.

Un député proposa de discuter le lendemain les résolutions du roi. Il ne fut pas écouté. Camus établit avec force et fit déclarer « que la séance n’était qu’un acte ministériel, que l’Assemblée persistait dans ses arrêtés ». — Le jeune Dauphinois Barnave : « Vous avez déclaré ce que vous êtes ; vous n’avez pas besoin de sanction. » — Le Breton Glezen : « Quoi donc ! le souverain parle en maître, quand il devrait consulter. » Pétion, Buzot, Garât, Grégoire, parlèrent aussi fortement. Et Sieyès, avec simplicité : « Messieurs, vous êtes aujourd’hui ce que vous étiez hier. »

L’Assemblée déclara ensuite, sur la proposition de Mirabeau, que ses membres étaient inviolables, que quiconque mettait la main sur un député était traître, infâme et digne de mort.

  1. Rapporté par M. Frochot, témoin oculaire, au fils de Mirabeau. (Mém., VI, 39.) La famille Brezé s’est avisée de contester quelques détails de cette scène, si bien connue, quarante-quatre ans après l’événement.