Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/125

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qu’en brisant l’épée dans la main du roi, c’est que, de tous les pouvoirs, celui qu’il était le plus dangereux de lui laisser dans les mains, c’était justement la guerre.

L’occasion du débat était celle-ci. L’Angleterre avait été alarmée de voir la Belgique tendre la main à la France. Elle commençait à s’effrayer, tout comme l’Empereur et la Prusse, d’une révolution vivace, contagieuse, qui gagnait, et par son ardeur, et par un caractère de généralité (plus que nationale) humaine, très contraire au génie anglais. Un homme de talent, passionné et vénal, l’Irlandais Burke, élève des Jésuites de Saint-Omer, lança aux Chambres une furieuse philippique contre la Révolution, laquelle lui fut payée comptant par son adversaire, M. Pitt. L’Angleterre n’attaqua pas la France, mais elle abandonna la Belgique à l’Empereur, elle alla au bout du monde chercher querelle sur les mers à notre alliée, l’Espagne. Louis XVI fit savoir à l’Assemblée qu’il armait quatorze vaisseaux.

Là-dessus, une longue, immense discussion théorique sur la question générale : À qui appartient l’initiative de la guerre ? — Peu ou rien sur la question particulière, qui pourtant dominait l’autre. Tout le monde semblait l’éviter, la fuir, avait peur de la voir.

Paris n’en avait pas peur, Paris l’envisageait en face. Tout le monde sentait, disait que, si le roi avait l’épée, la Révolution périssait. Il y avait cinquante mille hommes aux Tuileries, à la place Vendôme,