Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/142

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quand on voit les ruines, les déserts, qu’a faits le vieux fanatisme… Que serait-il arrivé, si tout le Midi, tout l’Ouest, toute la France, étaient devenus Vendée ?

Mais la contre-révolution n’avait pas une autre chance. Au génie de la fraternité un seul pouvait être opposé, celui de la Saint-Barthélemy.

Telle fut à peu près la thèse que, dès janvier 1790, soutint à Turin, devant le grand conseil de l’émigration, l’ardent envoyé de Nîmes, homme du peuple, homme de peu, mais tête forte, intrépide, qui voyait parfaitement et posait la question.

Celui qui, par grâce spéciale, était admis à parler devant les princes et les seigneurs, Charles Froment, c’était son nom, fils d’un homme accusé de faux (puis lavé), n’était lui-même rien de plus qu’un petit receveur du clergé et son factotum. D’abord révolutionnaire, il avait senti qu’à Nîmes il y avait plus à faire de l’autre côté. Tout d’abord il se trouva chef de la populace catholique, la lança aux protestants. Lui-même était beaucoup moins fanatique que factieux, un homme du temps des Gibelins. Mais il voyait nettement que la vraie force était le peuple, l’appel à la foi du peuple.

Froment fut gracieusement reçu, écouté, peu compris. On lui donna quelque argent et l’espoir que le commandant de Montpellier pourrait lui fournir des armes. Du reste, on sentit si peu combien il pouvait être utile que, plus tard, ayant émigré, il n’obtint pas même des princes la permission de se